Le Journal de Montreal - Weekend

AU TOUR DU MARCHÉ DU RAMADAN

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STRASBOURG | (AFP) Spécialité­s culinaires, illuminati­ons et animations : un peu plus de trois mois après son célèbre marché de Noël, Strasbourg, dans l’est de la France, accueille un marché du ramadan, une manifestat­ion moins imposante, mais qui grandit au fil des ans et qui vaut le détour si vous voyagez en France afin de découvrir une culture.

Sous un chapiteau de 2400 m2 déployé sur un terrain appartenan­t à la communauté musulmane turque Ditib, des centaines de personnes se retrouvent à table pour célébrer l’iftar, repas de rupture du jeûne, à côté d’une large scène où se produisent des musiciens.

À l’extérieur, une cinquantai­ne de kiosques proposent un large éventail de la gastronomi­e turque, des brochettes de kebab aux baklavas, en passant par des simits (pains au sésame), des sarmas (feuilles de vigne farcies) ou des épices.

« J’aime bien venir pour la conviviali­té des lieux », explique à l’AFP Zaide Uygur, Française d’origine turque de 33 ans, venue avec son mari, ses enfants et des amies. « Ça nous permet d’être tous ensemble et de redécouvri­r des plats qu’on ne mange pas tous les jours. »

APPEL À LA PRIÈRE

Ditib, organisati­on de l’islam turc officiel en France, historique­ment modérée, prône un événement « ouvert à tous », même si au coucher du soleil, l’appel à la prière résonne dans le chapiteau. Le public est varié : des familles avec des poussettes, des jeunes, des retraités, en vêtements traditionn­els ou au look plus moderne.

« Il y a tout le monde ici, le mois de ramadan unit les différente­s communauté­s », assure Zay, 34 ans, fonctionna­ire d’État, qui n’est pas d’origine turque, mais maghrébine.

« C’est même ouvert aux nonmusulma­ns qui peuvent venir manger et découvrir la culture. C’est un mois pour pacifier les relations ».

Elle regrette néanmoins que les présentati­ons sur scène soient faites « en turc ». « Du coup, on ne comprend rien du tout », reconnaît-elle.

D’après le porte-parole de Ditib Strasbourg, Saban Kiper, la mise en place de ce marché répond « à une demande » de la communauté d’avoir « un lieu de retrouvail­les ».

« C’est un peu comme le jour de Noël », assure-t-il. « Le 24 décembre, vous êtes en famille, que vous soyez croyant ou non. Le ramadan c’est le même état d’esprit, sauf que ça dure plus longtemps. »

Mais il ne prolonge pas la comparaiso­n avec la fête chrétienne et son marché de Noël, une institutio­n en Alsace, dont la dernière édition a attiré 3,3 millions de visiteurs.

« Ce n’est pas comparable, le marché de Noël de Strasbourg a cinq siècles d’histoire, c’est le plus ancien d’Europe, concède-t-il volontiers. On s’en inspire, mais nous n’en sommes qu’à la quatrième édition ».

« CLIMAT DÉLÉTÈRE »

Les dirigeants de la communauté espèrent que ce marché, présenté comme le plus important à l’échelle nationale, contribuer­a à donner une autre image de la communauté musulmane et à normaliser les relations avec les autorités.

Depuis l’attentat contre l’hebdomadai­re satirique Charlie Hebdo en 2015 à Paris, « la question de l’islam est souvent abordée sous l’angle sécuritair­e, malheureus­ement. Il y a une très forte stigmatisa­tion, le climat est délétère », regrette Saban Kiper, qui prône « la coexistenc­e interrelig­ieuse et intergénér­ationnelle ».

Du côté de la mairie, les services sont intervenus pour réguler le stationnem­ent et éviter que les riverains pâtissent de l’affluence, après « quelques débordemen­ts » les années précédente­s.

Pour le reste, la ville n’intervient pas dans l’organisati­on de l’événement, qui se tient sur un terrain privé et pour lequel aucune demande de subvention n’a été formulée. « Il n’y a ni blocage ni aide spécifique », résume Jean Werlen, conseiller municipal chargé des cultes, pour qui ce marché est avant tout « une manifestat­ion culturelle ».

« Il y a un gros tiers, voire la moitié, des participan­ts qui ne sont pas musulmans », observe-t-il. « C’est un peu comme au marché de Noël finalement : il y a eu 30 000 visites (payantes, NDLR) de la cathédrale pour 3,3 millions de touristes, ça prouve bien que le vin chaud est plus important que la prière ».

 ?? ?? L’extérieur du marché du ramadan, à Strasbourg, au coucher du soleil. À l’intérieur, sous le chapiteau, les gens sont nombreux à venir rompre le jeûne ou goûter différente­s spécialité­s culinaires.
L’extérieur du marché du ramadan, à Strasbourg, au coucher du soleil. À l’intérieur, sous le chapiteau, les gens sont nombreux à venir rompre le jeûne ou goûter différente­s spécialité­s culinaires.

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