Le Journal de Montreal - Weekend

LOUISE LATRAVERSE VUE DE PRÈS

- JACQUES LANCTÔT Collaborat­ion spéciale

Louise Latraverse aime se souvenir. Quatre-vingt-trois ans, c’est un bel âge pour se rappeler et raconter certains épisodes de cette longue vie bien remplie, entre le Lac-Saint-Jean, Montréal et New York. Car, il y a plusieurs Louise Latraverse, comme le disent en préface Ines et Elkahna Talbi, « y a la femme, la mère, l’amante, l’autrice, la peintre, l’animatrice, l’enfant, la grande actrice, la gourmande, l’intellectu­elle, la fille du Saguenay, l’amie ». Et j’ajouterais la militante indépendan­tiste, qui croit toujours en son vieux rêve d’un pays québécois, comme elle n’a pas hésité à l’affirmer sur le plateau de l’émission Tout le monde en parle, dimanche dernier.

Loulou, comme on l’appelle familièrem­ent, se livre ici sans pudeur, au gré de ses souvenirs, sans l’ordre chronologi­que habituel, ce qui accentue l’effet de surprise à chaque page. À 50 ans, fatiguée d’être écartelée entre dix mille projets, frôlant les murs de la dépression, elle prend son destin en main en débutant une psychanaly­se qui allait changer sa vie. C’est aussi vers cette même période qu’elle commence à dessiner ; des dessins d’une belle naïveté qu’on retrouve dans cet ouvrage unique.

Cinq ans plus tard, elle entreprend, seule, un voyage de trois mois en Inde où elle apprendra l’art de regarder, en compagnie d’un gourou, peintre et musicien. L’Inde l’émerveille­ra, elle qui avait vécu à New York quelques années.

DE LA RADIO À LA TÉLÉ

Trente-huit ans auparavant, à l’âge de 17 ans, elle se fera speakerine dans une station de radio de Chicoutimi. Très jeune, elle goûtera aux plaisirs de la communicat­ion, à tel point qu’elle décrochera, quelque temps plus tard, un emploi de co-animatrice dans la grande ville, à CKVL, aux côtés du beau Jean Coutu, le Survenant dans le feuilleton télé de Germaine Guèvremont. De speakerine à la radio, elle passera rapidement à la télévision, alors que le dramaturge Marcel Dubé lui propose un rôle dans son nouveau télé-théâtre, La côte de sable, en 1960. Elle y fera la connaissan­ce de Pierre Bourgault et de Clémence Desrochers, qui deviendron­t ses amis, ainsi que Claude Léveillée, dont elle tombera amoureuse.

Son frère, Guy Latraverse, grand producteur artistique, a plus nui qu’aidé à sa carrière, dit-elle. Il n’y avait pas de place pour deux Latraverse à Radio-Canada, aimait-il répéter à la blague. Pourtant, c’est un peu grâce à sa soeur s’il est devenu agent d’artistes. Louise, qui fréquentai­t le chanteur Claude Léveillée, avait dit à son frère que son amoureux avait du mal à se faire payer par une boîte à chansons. Guy, simple comptable dans une entreprise de relations publiques, est alors intervenu auprès du propriétai­re, en menaçant d’annuler le spectacle si son chanteur n’était pas rémunéré à sa juste valeur. Ce qui fut fait. Une vocation était née.

AU COEUR DE L’ACTION

Louise Latraverse ne craint pas d’affirmer qu’en amour, elle est une passionnée. L’amour quotidien, la routine, très peu pour elle, même si elle doit souffrir pour pouvoir vivre à fond sa passion. C’est ainsi qu’elle s’est retrouvée à Woodstock, en 1969.

« C’était une époque où on vivait à 100 milles à l’heure, écrit-elle. On avait la pilule, c’était le début du féminisme et de la libération sexuelle. C’était énorme, fabuleux. Pas de cadran, pas de capote ! Au Québec, on sortait du duplessism­e. Tout à coup, tout était formidable. On était libres. C’était un moment de grande créativité, de révolution culturelle. »

Puis elle rencontrer­a Emmet, un activiste et une idole de la contrecult­ure étatsunien­ne. « Il faisait des discours, il était très sollicité, alors je me suis retrouvée moi aussi au coeur de l’action : Bob Dylan, Janis Joplin, Andy Warhol, les Rolling Stones, les Beatles, Robbie Robertson, Allen Ginsberg, Elizabeth Taylor… je les ai tous fréquentés », avouet-elle tout naturellem­ent.

Ce livre, cet album, ce scrapbook est un merveilleu­x porte-bonheur, qui ne s’adresse pas seulement aux baby-boomers, mais aussi au grand public qui aime voir les comédiens et comédienne­s de près.

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LOUISE LATRAVERSE Éditions Québec Amérique
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