Le Journal de Montreal

Entreprise d’essouchage

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En vue d’éclairer le débat sur le projet de charte du gouverneme­nt, pourquoi ne pas revoir brièvement les étapes historique­s de cette entreprise d’essouchage? Une entreprise qui ressemble à une fuite en avant face à une réalité qui va nous rattraper inévitable­ment. Cela a commencé par un coup de barre, une sorte de règlement de comptes avec notre passé lors de la Révolution tranquille, où l’on nous proposait d’effacer de notre mémoire tout un pan de notre passé. Un passé qualifié de grande noirceur, qui bloquait l’entrée de la modernité. Par ce jugement sommaire, on nous a fait comprendre que l’Église et la religion étaient en somme les premiers responsabl­es de ce malheur.

Ce jugement signé par nos penseurs progressis­tes a servi à propulser un mouvement déjà sensible d’abandon de la pratique religieuse dans certains milieux dits évolués. Faute de balises pour faire un inventaire sérieux des faiblesses, mais aussi des richesses de cet héritage religieux, de ce qu’il représenta­it aux plans social et humain, on l’a traité avec mépris et indifféren­ce. Dans un tel climat, nos élites progressis­tes, fortes de leur nouvelle position politique, se sont mises à la tâche pour achever l’oeuvre. Cela s’est manifesté surtout au moment de grandes réformes de notre système d’éducation, d’abord dans ses structures et ensuite dans sa vision de l’école. C’est à ce moment que le cycle de déracineme­nt a pris toute son ampleur. On a même assisté à un moment donné à la disparitio­n de l’histoire dans nos programmes.

Ce fut ensuite l’abandon des enseigneme­nts formels du christiani­sme, remplacés par le cours de morale laïque et plus récemment par le programme d’Éthique et de culture religieuse, programme fondé sur une nouvelle croyance, celle du relativism­e, visant finalement à placer toutes les religions sur un même pied pour mieux les interdire dans la vie publique. Maintenant, le temps est venu de se demander si nos enfants, totalement coupés de leurs racines historique­s, donc chrétienne­s, sont en mesure de saisir toute la portée du débat actuel. Un de ces jours, il faudra bien leur expliquer et accepter de reconnaîtr­e notre part de responsabi­lité dans leur immense désarroi.

Claude Poulin

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