Le Journal de Montreal

Santé Premiére chronique du D'Réjean Thomas

Avez-vous déjà remarqué que la santé de tout le monde est considérée comme une affaire publique ? Que n’importe qui peut avoir une opinion sur la santé de son voisin?

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« Elle ne devrait pas fumer, c’est mauvais pour ses enfants » . Ou encore « Il est gros parce qu’il boit trop de soda».

Tout le monde a son opinion car la santé coûte cher. Nous sommes arrivés au point où on refuse d’opérer des fumeurs d’un cancer du poumon.

L’universali­té des soins a atteint sa limite.

Modes de vie

Dans cette logique, on a tendance à associer les personnes en mauvaise santé à des pratiques liées à leurs modes de vie que l’on juge.

On ne cherche pas à comprendre pourquoi ces modes de vie affectent davantage les personnes vulnérable­s. Or, la santé est aussi liée à l’environnem­ent social. Cela fait bientôt cinquante ans que bien des études prouvent les liens entre la santé et les déterminan­ts sociaux.

À Montréal, l’espérance de vie montre toujours un écart de dix ans entre des personnes qui vivent dans un quartier défavorisé et celles qui habitent en milieu favorisé.

Il existe deux types de déterminan­ts sociaux.

Premièreme­nt, certains groupes sociaux placent les personnes qui en font partie dans une situation de plus grande vulnérabil­ité par rapport à des problèmes de santé.

Les hommes ayant des rela- t i ons sexuelles avec des hommes, les utilisateu­rs de drogue par i njection, l es jeunes de la rue sont plus à risque face au VIH et aux infections transmises sexuelleme­nt et par le sang ( ITSS).

Deuxièmeme­nt, des facteurs sociaux et économique­s i nfluencent l’état de santé. Un niveau d’éducation et de revenus faibles, un statut social instable, la violence conjugale et l’isolement affectent la qualité de vie des personnes concernées.

Ces deux types de déterminan­ts se cumulent et rendent les personnes d’autant plus vulnérable­s.

Par exemple, un homme gay ayant un niveau d’éducation peu élevé et de faibles revenus est beaucoup plus vulnérable qu’un homme gay profession­nel ayant une position sociale importante. La santé du premier peut être beaucoup plus fragile et il risque davantage d’être marginalis­é et confronté à des actes de discrimina­tion.

CerCle viCieux

Non seulement la santé des personnes défavorisé­es est plus fragile (par exemple l’obésité, le tabagisme, la détresse psychologi­que) mais il est aussi plus difficile d’améliorer leurs conditions de vie et leur bienêtre.

C’est un cercle vicieux car les personnes vulnérable­s ont peu accès aux moyens de prévention. Ce n’est pas une priorité quand le loyer représente un tiers d’un revenu faible. Elles utiliseron­t les services de santé lorsqu’elles n’ont plus le choix et, souvent, à l’hôpital.

Il existe plusieurs mécanismes pour réduire ces écarts.

La lutte contre la pauvreté et la vulnérabil­ité en matière de santé n’est pas uniquement une question économique.

Valoriser l’éducation dans tous les milieux permet de réduire le décrochage scolaire et le nombre de jeunes qui deviennent vulnérable­s.

Développer des moyens de prévention simples et accessible­s conduit les personnes vulnérable­s à prendre progressiv­ement en charge leur santé. Il est essentiel que l’État renforce ses investisse­ments dans ces deux mesures.

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