Injustice fiscale : le rapport Godbout risque de décevoir
Le gouvernement a entre ses mains le rapport Godbout sur l’examen de la fiscalité québécoise depuis plus d’un mois. Fidèles à leur style, les libéraux auront décidé de le garder secret le plus longtemps possible.
Résultat, le rapport de plus de 600 pages préparé par le fiscaliste Luc Godbout, à un coût estimé de 2,5 M$, ne sera dévoilé que jeudi prochain, quelques jours avant le dépôt du budget. Une telle manoeuvre vise sans aucun doute à limiter le débat public sur cette question qui aura d’importantes répercussions sur le budget de la province, mais aussi sur les finances personnelles de tous les Québécois.
Les quelques informations coulées à un journaliste, comme autant de ballons d’essai, sont pourtant inquiétantes. Les pistes préconisées par M. Godbout nuiraient aux salariés et favoriseraient encore davantage ceux qui bénéficient des plus hauts revenus et obtiennent déjà la majorité des privilèges fiscaux. L’approche défendue par le fiscaliste est une fausse bonne idée.
Le rapport proposerait notamment l’augmentation de la TVQ pour ensuite réduire les impôts sur le revenu. Si cela se confirme, le Québec aura fait un pas de plus vers l’injustice fiscale. Notre régime fiscal serait alors plus régressif, c’est-à-dire que des personnes qui gagnent plus d’argent payeraient proportionnellement moins de taxe et d’impôt que d’autres qui gagnent moins qu’eux.
L’alternative est pourtant simple. Ce qu’il faut, c’est diminuer les privilèges fiscaux comme les exemptions et crédits d’impôt qui sont utilisés presque exclusivement par les mieux nantis. Par exemple, les actionnaires ne sont imposés que sur la moitié de leurs revenus de dividendes et gains en capital alors que les salariés sont imposés sur l’ensemble de leurs revenus.
Prenez par exemple deux contribuables gagnant chacun un revenu annuel de 75 000 $. Le premier, un travailleur salarié, payera 11 540 $ d’impôt provincial sur le revenu. Le second, propriétaire d’entreprise, obtient tous ses revenus des dividendes et des gains en capital sur ses actions. Il ne payera que 4560 $ d’impôt, deux fois moins que son voisin salarié qui a pourtant le même revenu annuel. Est-ce juste?
Si le gouvernement souhaitait réellement rétablir l’équité, il pourrait abolir cette exemption pour les très hauts revenus. Les rentrées d’argent additionnelles (estimées à un milliard) aideraient à combler le déficit et à réduire un peu l’impôt des salariés qui font moins de 60 000 $. Malheureusement, les gouvernements qui se sont succédé à Québec ont un préjugé favorable pour ceux qui possèdent les entreprises plutôt que pour ceux qui y travaillent.
L’augmentation des taxes de vente et des tarifs des services publics comme Hydro-Québec sont des mesures qui touchent en premier lieu les contribuables qui ont les revenus les moins élevés. Si l’ex-banquier et ministre des Finances Carlos Leitão suit la voie tracée par Luc Godbout, son gouvernement ne pourra plus prétendre travailler pour la classe moyenne.