50 % amusant, 50 % prévisible
Avec 100 % Lemire , Daniel Lemire rate quelques fois la cible
Daniel Lemire a beau être un monument de l’humour québécois et cumuler plus de 30 ans de métier, son nouveau spectacle manque cruellement de préparation. On se serait attendu à beaucoup plus du père d’Oncle Georges et de Ronnie.
On le sait, la compétition dans le milieu de l’humour est extrêmement vive, ces dernières années. Pour arriver à se démarquer de la quarantaine de spectacles qui tournent présentement à travers la province, les humoristes doivent mettre les bouchées doubles et roder très longuement leur spectacle avant de venir le présenter officiellement à Montréal.
Ainsi, il n’est pas rare de voir un humoriste faire sa première médiatique après 30 ou même 40 spectacles de rodage. C’est simple, le droit à l’erreur est inexistant.
Pour son dixième spectacle solo en carrière, Daniel Lemire est arrivé dans la métropole avec seulement 15 spectacles de rodage derrière lui. Pire encore, lorsque nous l’avons vu pour l’avant-première à la salle Pierre-Mercure, il n’avait joué 100 % Lemire qu’une seule fois en 2015 (le 21 février à Sainte-Geneviève). Ses autres spectacles remontaient au mois de novembre.
L’ACTUALITÉ DANS LE TORDEUR
Rouillé, l’humoriste, qui a passé plusieurs semaines au Mexique cet hiver, l’était visiblement. Tout au long du spectacle, on l’a vu jeter des coups d’oeil à un télésouffleur qui était posté devant lui sur la scène.
Lemire a entamé son spectacle avec ce qu’il sait faire de mieux: rire de l’actualité. Ce tour du monde souvent brillant est livré sans aucune véritable ligne directrice, l’humoriste passant d’un sujet à l’autre, nous servant quelques bonnes lignes («Jean-François Lisée est un homme cultivé, quand il fait un gaz, ça fait “Proust”», «la reine n’a pu venir au Canada l’an dernier parce qu’elle avait des problèmes d’intestins, c’est un peu normal, ça fait 60 ans qu’elle est sur le trône»).
Malheureusement, ces enfilades de «one liners» sont parfois amenuisées par d’autres gags très prévisibles (il rit du physique de Gaétan Barrette et des gaffes de Justin Trudeau).
Lemire aurait assurément gagné à s’entourer de quelques scripteurs au lieu de prendre la quasi-totalité du texte sur ses épaules.
MANQUE DE FINITION
En deuxième partie, lorsqu’il nous amène ses personnages d’Yvon Travaillé, Ronnie et Oncle Georges, on rit parfois de bon coeur, mais là aussi, on constate le manque de finition alors qu’aucun numéro ne comprend de bonne chute (communément appelée «punch out»). Quitter la scène chaque fois en saluant la foule n’est pas ce qu’on appelle une finale efficace.
Cela dit, connaissant la réputation de Daniel Lemire, et parce que les spectateurs semblaient s’amuser sincèrement durant la soirée, tout n’est pas perdu avec
100 % Lemire . On espère plutôt que le spectacle se bonifiera au fil des représentations.