Sport, politique et morale
JE vEux BiEn qu’on s’AmusE Et qu’on FAssE DE l’ArgEnt En prAtiquAnt un sport ou En lE CouvrAnt. PAs DE proBlÈmE.
Mais est-ce une raison pour faire comme si notre sens des responsabilités n’existait plus? Où est-ce que je veux en venir? Voici. La FIFA, cet organisme dirigé par un clown nommé Sepp Blatter, a déplacé à l’hiver la Coupe du monde de soccer de 2022 au Qatar parce qu’on vient de «découvrir» qu’il fait trop chaud là-bas l’été.
NON, MERCI
Mais la FIFA se fout éperdument qu’au Qatar, on persécute les homosexuels, on infantilise les femmes et on traite comme des esclaves les travailleurs étrangers. L’important, c’est que le Qatar a de l’argent, beaucoup d’argent.
La Coupe du monde de 2018, elle, aura lieu en Russie, un pays où votre vie est en danger si vous posez trop de questions.
La Russie a pourtant tenu les Jeux olympiques de Sotchi, en 2014, en même temps qu’elle préparait l’invasion de l’Ukraine. Aucune importance, n’est-ce pas?
Qui sont les deux derniers candidats pour l’organisation des Olympiques d’hiver de 2022? La Chine et le Kazakhstan.
Dans tous ces pays, on repassera pour la démocratie et les droits de la personne.
Vous allez m’objecter que Londres a organisé les Olympiques d’été en 2012 et que le Brésil a été l’hôte de la Coupe du monde de 2014.
Les JO de Londres ont coûté trois fois plus cher que prévu. Les coûts délirants de la Coupe du monde au Brésil ont soulevé une immense tempête là-bas.
Dans ces deux pays, si on demandait aujourd’hui aux gens, maintenant qu’on connaît les vrais chiffres, si cela valait la peine, la réponse serait: à ce prix-là, non, merci.
DÉPLACEMENT
Dans les vraies démocraties, les politiciens, parce qu’ils doivent être élus, minimisent les coûts et exagèrent les retombées de ces mégaévénements. Mais la vérité finit par sortir et le refus populaire de ces extravagances augmente.
Les peuples, très raisonnablement, veulent que les fonds publics aillent aux hôpitaux, aux écoles et aux routes. Le CIO et la FIFA se foutent de cela.
Résultat: ces mégaévénements se tiendront de plus en plus dans des régimes antidémocratiques et brutaux, mais riches, justement parce que la voix des peuples n’est pas prise en compte.
Les événements servent alors de prétextes à de vastes opérations de propagande au profit des potentats et des dictateurs.
Ce déplacement est accéléré par les exigences de la FIFA et du CIO pour des stades flambants neufs, des villages olympiques construits de toutes pièces, du transport modernisé, etc.
Nous, payeurs de taxes, amateurs de sports et commentateurs, sommes, directement
Sepp Blatter
ou indirectement, un peu complices.
Quand nos fonds publics servent à entraîner nos équipes nationales qui s’en vont dans ces pays, nous finançons, indirectement, le maintien au pouvoir de ces cliques brutales et corrompues.
Quand nos médias couvrent ces événements, nous participons à ces vastes opérations de propagande.
MODESTIE
La solution n’est pas dans d’irréalistes boycottages qui pénalisent des athlètes qui ne sont coupables de rien.
La vraie solution serait que le CIO et la FIFA disent non à leurs folles exigences et aux coûts pharaoniques qu’elles entraînent, et qu’on revienne à des compétitions de taille humaine, plus raisonnables, utilisant mieux les installations déjà existantes.
Oui, je sais, j’ai l’air d’un rêveur. Mais tout commence par un rêve, non?