Nos racines d’acier
Faites le test avec vos proches. Demandez-leur s’ils aiment, ou s’ils aimeraient voyager plus souvent par train. À temps et tarifs égaux, choisiraient-ils le rail pour aller à Toronto au lieu de l’avion? Pour ma part, je réponds oui aux deux questions. En théorie.
Dans la pratique, je ne le fais que rarement. Même si le service à bord de VIA Rail est supérieur à celui des compagnies aériennes. (Les repas chauds trois services, avec apéro et digestif, existent toujours en classe affaires.) Même si le train vous dépose au centreville. Même si la sécurité n’est pas envahissante, tout cela n’est pas suffisant pour convertir les grands voyageurs.
Les innombrables escales dans des petites villes ontariennes, les arrêts à répétition pour laisser passer les trains de marchandises du CN et du CP, toujours prioritaires, les retards, les vieux wagons ainsi que des horaires mal adaptés viennent à bout du plus fervent trainophile.
Il y a quelques années, VIA offrait un service de nuit, avec couchette, entre Montréal et Toronto. C’était génial: le train quittait la Gare Centrale vers 23 h 30. Dodo sous la couette toute la nuit. Petit déjeuner servi au lit le matin. Une douche et hop, le train entrait à la gare Union à 8 h 30.
Le service a été discontinué. Je suis retournée chez Air Canada.
PAS BESOIN D’ALLER LOIN
J’ai longtemps habité Montréal-Ouest, une municipalité desservie par le train de banlieue. J’adorais aller travailler en train. J’avais l’impression d’être en vacances en Angleterre quand nous traversions Westmount. Mais je ne prenais ce train que très rarement: le service se terminait à 18 h 30.
Nous apprenions hier que le patron de VIA Rail recherche des investisseurs pour doter le corridor ferroviaire Montréal-Ottawa-Toronto de voies réservées au transport de passagers. Je souhaite qu’il trouve les 3 milliards $ nécessaires. Et plus encore. Depuis le temps que l’on discute de trains ultrarapides sur ce trajet. Un jour, verra-t-on au Canada un service offert en Europe depuis 30 ans?
C’est une question d’achalandage. L’Europe arrive troisième derrière l’Inde et la Chine pour le nombre de passagers par kilomètres, selon l’International Union of Railways. Le Canada n’apparaît même pas dans les statistiques. Le nombre de personnes qui prennent le train augmente presque
partout, sauf ici.
NOTRE HÉRITAGE
Le train fait partie de notre ADN. Le Canada, le Québec, le continent au complet se sont développés grâce au chemin de fer. Nous avons des racines d’acier. Bombardier fabrique des wagons de train. La Caisse de dépôt vient d’acquérir 30 % de l’Eurostar. Le ministre des Transports Robert Poéti annonçait le 6 mars que le gouvernement du Québec avait l’intention d’acquérir le train entre Gaspé et Matapédia, un tronçon de 320 km d’une très grande beauté.
Le train appartient au futur parce qu’il est écologique. L’International Union of Railways fera un coup d’éclat au sommet sur le climat à la fin de l’année. Des trains qui viendront d’aussi loin que de la Mongolie et d’Europe convergeront simultanément vers Paris, question de rappeler que le train offre une solution au réchauffement climatique.
On aime le train, mais le train nous aime mal.
le canada, le québec, le continent au complet se sont développés grâce au chemin de fer. nous avons des racines d’acier.