Le rapport Coulombe, 10 ans plus tard
Nous avons toujours aimé Richard Desjardins. Son angle est pamphlétaire, mais en proposant sa vision forestière il a accentué la réflexion publique. Sa récente série de chroniques confirme que sa plume est toujours aussi lumineuse et porteuse d’images fortes. Son mépris pour ceux qui oeuvrent dans le secteur forestier est malheureusement toujours aussi intense.
Les coopératives sont présentes en forêt depuis 75 ans. Elles ont été les témoins d’une évolution constante des pratiques. Il reste certainement encore à faire, dans un difficile contexte de reconfiguration des marchés, mais les changements sont indéniables depuis le rapport Coulombe.
Richard Desjardins touche à des cordes sensibles, mais il prend aussi plusieurs raccourcis qui nuiront à l’image du secteur, s’il est le seul à établir le bilan. Comment un chanteur fait-il pour avancer des constats aussi tranchants pour un sujet si complexe? Tentons de rétablir quelques faits: Le point de départ est biaisé, le rapport Coulombe proposait plusieurs recommandations constructives s’appuyant sur des données comportant d’importantes nuances. Il n’était pas question de constats «accablants».
Il a «l’impression que le bateau est toujours attaché au quai», mais il énumère aussi des changements fondamentaux: changement du logiciel du calcul de la possibilité, nomination du Forestier en chef, transfert de la responsabilité de la planification et de la réalisation des travaux sylvicoles au gouvernement, introduction d’un libre marché pour la vente des bois et introduction de la gestion écosystémique.
Il prétend que l’industrie forestière exploite 88 % du pays. La superficie forestière attribuée s’élève à 276 968 km 2 sur 498 353 km 2 de terrains forestiers, soit 55 %. Si l’on prend en référence tout le territoire du «pays», le pourcentage tombe à 18 %.
Pour les aires protégées, il évite de mentionner que notre réseau est d’une qualité exceptionnelle. Les fonctionnaires ont effectué un travail extraordinaire pour implanter un réseau qui reflète déjà la richesse de la diversité de nos provinces naturelles.
Au sujet des «machineries lourdes» sur les sols fragiles, il néglige d’expliquer que les forêts québécoises ont besoin de perturbations pour se régénérer (naturellement) et que les coupes avec protection de la régénération et des sols les protègent, mais conduisent à la paludification, soit l’accumulation de matières organiques et surtout une diminution de la fertilité.
Pour la valeur des redevances, il n’explique pas que la diminution du volume de récolte, passé de 30 Mm 3 à moins de 20 M m 3 , entraîne forcément une diminution des revenus. En fait, en maintenant l’effort sylvicole, le gouvernement a fait exactement ce que propose Desjardins. Il y aurait encore beaucoup à corriger, mais nous préférons conclure en affirmant que, malgré son opinion, nous sommes toujours fiers de travailler en forêt et de contribuer à l’émergence d’une foresterie durable. Nous sommes persuadés que la forêt fait partie des outils pour améliorer la performance environnementale du Québec parce que, notamment, le matériau bois, issu de pratique d’aménagement forestier durable, contribue à réduire nos émissions de GES.