Le Journal de Montreal

Le combat d’Ashley Judd

- SOPHIE DUROCHER sophie.durocher @quebecorme­dia.com

«Je me suis fait traiter de plotte, de pute, de salope, et je me suis fait dire de sucer des qu…s. (...) Je me suis fait menacer de viol et de viol anal. (…) J’ai lu des descriptio­ns en langage imagé des différente­s façons, humiliante­s et violentes, dont mes parties génitales, mon vagin et mon anus, devraient être violés, humiliés, exploités ou dominés.» --Ashley Judd

Mais qu’a donc fait l’actrice américaine pour mériter autant de violence? Elle a eu la mauvaise idée de commenter un match de basketball sur Twitter dimanche soir.

Et ça, une fille qui parle de sport, les gros machos n’aiment pas ça.

VLAN DANS LES DENTS!

Ashley Judd, qui a presque 250 000 followers sur Twitter, aurait pu se dire: «Je suis une actrice connue, je me moque des crétins qui s’en prennent à moi» .

Mais devant la quantité de tweets à caractère sexuel auxquels elle a dû faire face, elle a décidé deux choses:

1-elle a écrit une longue lettre ouverte dans laquelle elle dénonce les attaques dont sont systématiq­uement victimes les femmes qui s’expriment (et pas juste sur le sport);

2-elle a décidé de poursuivre les trolls qui ont cherché à l’humilier.

#NIPUTENISA­LOPE

En novembre dernier, à la suite de l’affaire Jian Ghomeshi, un mouvement est né sur Twitter avec le mot-clé #agressionn­ondénoncée. Des milliers de femmes (et d’hommes) ont pris la parole pour dénoncer une agression ou un harcèlemen­t.

Et si on lançait sur internet un mot-clé pour dénoncer chaque fois que sur Facebook ou Twitter quelqu’un attaque une femme en s’en prenant à sa sexualité ? J’ai envie de lancer le mouvement #niputenisa­lope. Chaque fois que vous verrez un commentair­e sexuel haineux, une menace de viol ou une insinuatio­n que vous avez eu votre job «en suçant des qu…s» utilisez ce mot-clic.

Ces gens-là ont des conjointes, des patrons, des enfants. Il faut qu’ils comprennen­t que leur comporteme­nt est inacceptab­le.

Plus jeune, Ashley Judd a été victime d’inceste et de viol. Dans sa lettre, elle raconte qu’après plusieurs thérapies, elle se porte mieux. Mais aujourd’hui, quand elle lit ces commentair­es horribles sur les médias sociaux, c’est comme si elle était agressée une deuxième fois.

Au nom de toutes les femmes qui se font agresser (virtuellem­ent) sur les médias sociaux, peut-on arrêter ce tsunami de haine sexuelle?

TOLÉRANCE ZÉRO

Dans Le Journal de Montréal et Le Journal de Québec , toutes les femmes d’opinion que vous lisez et que vous aimez, ont été victimes à un moment ou l’autre d’attaques à caractère sexuel.

Je ne dis pas que les gars ne se font jamais attaquer. Mais personne ne leur dit qu’ils ont eu leur job de chroniqueu­r en «suçant des totons», personne ne menace de les sodomiser, personne ne leur dit qu’ils sont «mal baisés».

Autrement dit, à aucun moment ce qu’ils ont de plus intime et de plus personnel n’est dénigré sur la place publique.

Se faire traiter de con, ce n’est pas agréable. Mais se faire menacer de se faire «défoncer le con» c’est épeurant.

Et c’est cette peur-là dont les femmes sont tannées. Qu’elles s’appellent Ashley Judd, Lise Ravary ou Tania Longpré.

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