Le Journal de Montreal

Le champ de ruines

- J. JACQUES SAMSON Journalist­e, chroniqueu­r jjacques.samson@quebecorme­dia.com

Keynésien sans retenue, M. Parizeau croit fermement en un État-providence toujours plus interventi­onniste

Jacques Parizeau est devenu premier ministre du Québec en septembre 1994 et il a tenu un second référendum sur la souveraine­té en octobre 1995, dans une conjonctur­e unique. Les Québécois venaient en effet d’être blessés par le rejet de l’accord constituti­onnel du lac Meech. Ils cherchaien­t un exutoire.

Pareilles conditions gagnantes pour un Oui à la souveraine­té n’avaient pas été réunies entre 1984, année de la démission de M. Parizeau du gouverneme­nt de René Lévesque, et 1990, année de l’échec de Meech, et n’ont pas été réunies depuis 1995.

M. Parizeau a toujours fait abstractio­n de cette conjonctur­e exceptionn­elle qui l’avait favorisé, dans ses critiques du traitement de l’option souveraini­ste par les autres chefs du PQ, qu’il a minés les uns après les autres depuis 1984. Aucun n’a trouvé grâce à ses yeux bien longtemps.

«Monsieur» n’est pas plus lucide dans la longue entrevue qu’il a accordée en février à Michel Lacombe de la radio de Radio-Canada et qui a été diffusée lundi.

Les autres chefs du PQ, de René Lévesque à Pauline Marois, n’ont pas fait en sorte de «démolir» leur parti. Ils ont tout simplement dû composer avec la réalité de l’impopulari­té de l’option souveraini­ste, particuliè­rement grandissan­te depuis 1995, et le refus des Québécois d’être plongés dans un autre référendum, déchirant et dommageabl­e pour l’économie.

Ces mêmes chefs se sont certes emmêlés dans des discussion­s byzantines, pour reprendre les mots de M. Parizeau, mais ils y ont été poussés, le plus souvent, pour acheter la paix d’une part avec la faction de militants qui a M. Parizeau pour gourou et rassurer la majorité des électeurs. Ils étaient coincés.

Cela se poursuit durant la présente campagne à la direction de ce parti.

L’INTERVENTI­ONNISME

M. Parizeau a aussi dénoncé les mesures d’austérité prises par le gouverneme­nt Couillard pour revenir à des budgets équilibrés.

Ce n’est pas étonnant. L’ex-ministre des Finances de 1976 à 1984 est à l’origine de la spirale de la dette dont le coût étrangle maintenant nos finances publiques, au point d’être devenu le troisième poste budgétaire. Depuis 1977, péquistes et libéraux ont empilé les déficits annuels, dans la foulée de M. Parizeau (à l’exception de huit années) et ce dernier aurait voulu voir Carlos Leitao en rajouter un autre en 2015-2016.

Keynésien sans retenue, M. Parizeau croit fermement en un État-providence toujours plus interventi­onniste. Il continue dans la même voie. Inquiet du retard pris par nos PME dans l’implantati­on de nouvelles technologi­es, il préconise un «remède de cheval». Il faut comprendre des dépenses massives de l’État, fiscales ou sous forme de subvention­s, pour les aider à rattraper ce retard.

DÉCONNECTÉ

M. Parizeau porte un jugement très dur: le PQ est devenu un «champ de ruines», dit-il.

S’il en est ainsi, peut-être est-ce tout simplement parce qu’il est à contre-courant de l’opinion d’une large majorité sur la souveraine­té, les finances publiques, le rôle de l’État et qu’aussitôt qu’un dirigeant cherche à le connecter, celui-ci se fait rentrer dedans par «Monsieur» et ses fidèles.

Cela dit, Jacques Parizeau donne toujours de l’aussi bonne copie aux journalist­es!

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