Le chemin de l’aventure
Trois canots, six coéquipiers et 7000 kilomètres de canotage (et de portage), de Montréal à Inuvik. L’équipe des Chemins de l’or bleu est prête à se lancer dans cette aventure dans moins de dix jours.
Si la glace veut bien céder sa place… On se rencontre tout près de leur point de départ. Le Lac des Deux-Montagnes n’est toujours pas calé, le mercure ne dépasse pas la barre du zéro. Il est dur de les imaginer se jeter à l’eau dans exactement 9 jours, le 18 avril prochain, comme prévu. Impressions partagées.
«C’est la seule chose qu’on ne peut pas contrôler, la météo», concède Julien Bilodeau de l’équipe des Chemins de l’or bleu.
Ils ont hâte que l’aventure commence, après des mois de bouchées doubles au travail ou l’école, d’élaboration de stratégies de logistique de ravitaillement et de matériel et les efforts de communication…
«On a même fait notre bouffe maison en partie! Valérie a passé l’hiver à faire de la sauce à spaghetti. Chez moi, présentement, j’ai même des olives qui sont en train de se déshydrater à la maison», me donne en exemple, Pénélope Germain Chartrand, en riant.
UN DÉPART RETARDÉ ?
On sent bien que s’il pouvait précipiter le printemps par eux-mêmes, ils n’hésiteraient pas une seule seconde. Mais c’est maintenant au printemps de faire son bout de chemin pour qu’ils puissent mettre leur bateau à l’eau.
L’équipe est prête à patienter une semaine de plus avant de partir, mais pas plus d’une semaine. Retarder leur départ compromettrait leur arrivée, déjà prévue pour le 20 octobre, soit assez tard en saison pour une arrivée dans le Grand Nord. On devine que ce ne sera pas chaud sur l’eau ni dans leur tente la nuit tombée. Ils ne doivent surtout pas en plus accuser du retard avant même de mouiller leurs pagaies.
Naturellement, les Chemins de l’or bleu ont un plan B : un départ d’Ottawa, comme d’autres ont fait avant eux.
«Ce serait vraiment crève-coeur… c’est plus significatif pour nous de partir d’ici, entourés de nos familles et de nos amis», confie Annik Shamlian.
UN RÊVE-PROJET COMMUN
Ce projet un peu fou est né d’un rêve, comme c’est souvent le cas.
«C’est un cadeau que je voulais me faire pour mes 30 ans», me dit Martin Trahan, l’instigateur du périple. Il a aujourd’hui 34 ans. Passer du rêve à l’action aura pris un déclencheur, comme c’est aussi souvent le cas.
«Il y a deux ans, je me suis retrouvé célibataire et j’ai vendu ma maison.» Ce n’était pas le cas de tous ses amis autour de lui.
Il a donc dû lancer une invitation dans des groupes de canoteurs pour recruter d’autres aventuriers prêts à tout lâcher pendant six mois pour l’accompagner.
Son appel à l’aventure a été le déclencheur d’Annik, qui caressait ce rêve de canoter sur le chemin des premiers explorateurs depuis 20 ans. Julien, lui, a trouvé que le projet tombait à point, directement à la fin de son BAC et en plein dans ses cordes. Valérie a embrassé l’occasion de tester ses limites physiques et mentales. Pénélope a été conquise par le «trip» intense. Jérémie, «n’ayant rien qui le retenait», a sauté sur l’invitation.
Un rêve boule de neige à l’inspiration contagieuse. Mais chaque membre des Chemins de l’or bleu a ses motivations, son histoire. Les rêves se partagent, mais jamais en leur entièreté. Comme les voeux.
UN DÉFI HUMAIN
Le froid, la pluie, le courant, les tiques, les ours leur font-ils peur? Non, c’est le défi humain qui revient sur leurs lèvres. Les petites tensions et frictions qui arrivent systématiquement alors qu’on passe énormément de temps en groupe dans des conditions difficiles loin des siens.
Il est plus difficile de s’y préparer. Nos propres actions peuvent nous surprendre dans un tel contexte, alors celles des autres…
Ils ont quand même pensé au chiffre «magique» de six – toujours la planification– pour maximiser leur chance et leur plaisir.
«Juste deux ou quatre, on fait plus rapidement le tour. Huit, on devient trop nombreux et ça nous ralentirait», explique Julien, et tout le monde renchérit.
Ils ont hâte de partir; on a hâte qu’ils nous racontent.
L’inspiration est contagieuse : où leur périple va-t-il nous mener?