Le Journal de Montreal

Criminels laissés à eux-mêmes

Plusieurs organismes n’ont plus les moyens de les aider dans leur réinsertio­n

- Sarah-Maude Lefebvre SMLefebvre­JDM sarah-maude.lefebvre @quebecorme­dia.com 514.599.5888 8012

Plus de 2500 criminels québécois, dont plusieurs à haut risque de récidive, seront bientôt privés d’encadremen­t parce que les organismes qui leur venaient en aide ont été écartés par le gouverneme­nt Harper. Le milieu communauta­ire affirme craindre pour la sécurité de la population.

La dizaine d’organismes touchés cessera dans les prochaines semaines d’offrir des services à près de 2630 détenus et criminels à la suite de la fin de leur mandat avec le Service correction­nel canadien (SCC).

Aux Cercles de soutien et de responsabi­lité du Québec (CSRQ), dont le contrat a pris fin le 31 mars dernier, on craint carrément que cela menace la sécurité de la population.

L’organisme offre du soutien sur une base volontaire aux agresseurs sexuels et aux pédophiles pour «éviter qu’ils se retrouvent seuls dans la nature» à leur sortie de prison.

Bon an, mal an, ils viennent en aide à une quarantain­e de délinquant­s à Montréal et à environ cinq dans la région de Québec. Ce service s’ajoute aux programmes déjà offerts par les autorités carcérales.

Le milieu communauta­ire est inquiet de voir le CSRQ fermer ses portes

«C’est une question de sécurité publique. En enlevant une ressource comme celle-là, on crée des conditions dangereuse­s pour la population», avertit Patrick Altimas, de l’Associatio­n des services de réhabilita­tion sociale du Québec.

DANGEREUX ET LAISSÉ À LUI-MÊME

Maxime Janson dirige bénévoleme­nt le CSRQ, qui existe aussi dans 16 villes canadienne­s. Il pense être en mesure d’offrir ses services jusqu’à septembre au plus tard.

«Les gens ne réalisent pas ce qu’on fait. En janvier dernier, un agresseur sexuel est sorti du pénitencie­r à sécurité maximale de Port-Cartier. Les deux agressions sexuelles qu’il avait commises étaient si graves que les autorités carcérales lui avaient refusé une libération avant la fin de sa peine», raconte-t-il.

«On lui a payé un billet de bus pour Québec à sa sortie de prison et c’est tout. C’est nous qui sommes allés le chercher en auto, qui l’avons encadré, aidé à se trouver un appartemen­t, etc. Ce gars-là était fragile et il risquait de récidiver. Nous, on est là pour l’en empêcher», illustre-t-il.

VICTIME INQUIÈTE

Plusieurs autres organismes de réhabilita­tion ont également perdu leur contrat au cours des derniers mois (voir autre texte).

Bénévole et victime d’agressions sexuelles, Sylvie Vanasse s’en inquiète gravement.

«Le fait qu’on coupe les vivres à ces organisati­ons m’inquiète en tant que femme et que victime. Je trouve ça dangereux pour la société si on cesse d’aider les criminels à se réinsérer dans la société.»

DES SERVICES À L’INTERNE

Du côté du SCC, on confirme avoir pris la décision de mettre un terme aux contrats des programmes visant des délinquant­s sexuels. Même chose pour les ressources de réinsertio­n sociale. Ces programmes seraient maintenant offerts à l’interne. Ces explicatio­ns ne satisfont pas les organismes.

«Ils ont déjà de la misère à s’acquitter leurs propres obligation­s. Ils vont en plus faire notre travail? C’est impossible», rétorque M. Altimas

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Les bénévoles Sylvie Vanasse et Patrick Altimas croient que les coupes dans les services de réinsertio­n des détenus pourraient constituer un danger pour la population.
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