Un air écossais de déjà vu
Les résultats constituent une grande victoire pour David Cameron, qui dirigera enfin un gouvernement majoritaire.
Lecteurs ensevelis sous les analyses et les sondages la veille d’élections supposément historiques, comme celle de jeudi au Royaume-Uni… ne perdez pas votre temps avec des supputations qui vont être contredites quelques heures plus tard par l’électeur-roi!
On nous prophétisait que la domination du bipartisme serait définitivement enterrée au Royaume-Uni. Le prochain gouvernement britannique ne pouvait être que minoritaire pour une deuxième fois.
On assisterait surtout à la défaite du premier ministre conservateur David Cameron, le Scottish National Party devant balayer la partie écossaise du royaume.
CAMERON GRAND GAGNANT
Or, c’est tout le contraire, ou presque, qui est arrivé. Les résultats constituent une grande victoire pour David Cameron, qui dirigera enfin un gouvernement majoritaire.
Les travaillistes défaits restent clairement, eux, le deuxième parti au pays, avec plus de 200 députés, pendant que les anciens alliés libéraux-démocrates des conservateurs sont littéralement laminés, passant de 55 à 8 élus.
Comme quoi, n’en déplaise aux analystes et aux sondeurs, la politique reste encore faite, parfois, de choses qui ne devaient pas arriver et qui arrivent. Cela, dans un contexte de volatilité croissante où certains électeurs ne se décident que le jour du scrutin.
La seule chose prédite qui est véritablement arrivée dans cette élection n’a rien d’étonnant pour les Québécois qui connaissent l’histoire politique de leur province. Il s’agit du triomphe du Scottish National Party.
Le parti indépendantiste écossais a fait élire 56 des 59 députés de cette région au Parlement de Londres. Huit mois à peine après la cuisante défaite des mêmes indépendantistes lors du référendum de septembre 2014!
Cela vous rappelle quelque chose? La réélection triomphale de René Lévesque, bien sûr, à la tête du gouvernement québécois, peu après son échec référendaire de 1980.
COMME LE BLOC QUÉBÉCOIS
Mais cela rappelle surtout les succès du Bloc québécois au Parlement fédéral au début des années 1990, après le rejet de l’accord du lac Meech. Quand le parti souverainiste en était venu à constituer un temps l’opposition officielle à Ottawa, à l’indignation du Canada anglais.
Cela n’a aucunement facilité l’indépendance du Québec, ce dont devraient prendre note ces indépendantistes écossais actuellement bien placés pour arracher pouvoirs et ressources supplémentaires au gouvernement Cameron.
Le Pays de Galles et l’Irlande du Nord ont d’ailleurs fait savoir qu’ils voulaient également plus de responsabilités. Comme ces provinces qui convoitaient naguère le statut de société distincte revendiqué par le Québec…
Espérons que les élites politiques écossaises n’emprisonneront pas leur nation dans une dynamique d’échec en misant tout sur une indépendance à laquelle leurs concitoyens semblent préférer une meilleure place au sein du Royaume-Uni.
Il est à souhaiter également que les souverainistes québécois fascinés par le cas écossais réalisent que l’on n’est pas en avance sur nous là-bas, mais au contraire en retard. Nous n’avons rien à envier à une Écosse jouissant de pouvoirs beaucoup moins importants que le Québec.
La langue reste évidemment le facteur déterminant: 80% des Québécois sont francophones, alors que le gaélique a disparu en Écosse, où l’on parle anglais. L’indépendance du Québec aurait plus de sens que celle de l’Écosse.
Cela ne signifie pas qu’elle soit plus importante que le Québec lui-même, comme semblent malheureusement le penser certains souverainistes.