Le Journal de Montreal

Puissant suspense californie­n

Pour la première fois de sa carrière, l’incomparab­le romancière américaine d’origine chilienne Isabel Allende s’est intéressée au thriller. Le jeu de Ripper est un puissant mélange de suspense, d’amour et de psychologi­e, assaisonné d’une pointe d’humour a

- MARIE-FRANCE BORNAIS

Isabel Allende met en scène une galerie de personnage­s truculents, colorés, vivants, du genre qu’elle seule est capable d’inventer, dans ce roman captivant. Indiana est massothéra­peute dans une clinique de San Francisco. Elle est séparée du père de sa fille et a du mal à se dire qu’elle pourrait refaire sa vie, soit avec Alan, un riche héritier, soit avec Ryan, un ancien «Navy Seal» qui a perdu une jambe au cours d’une mission en Afghanista­n.

Amanda, sa fille, a créé un jeu en réseau, Ripper, pour résoudre les grandes énigmes de l’histoire criminelle. Quand San Francisco est secouée par une série de meurtres étranges, Amanda met son groupe d’enquêteurs au travail et découvre assez vite que ce pourrait être l’oeuvre d’un tueur en série. L’enquête vire au cauchemar lorsque sa mère, Indiana, disparaît.

S’INSPIRER D’UN « NAVY SEAL »

«J’ai adoré écrire ce livre: c’était tellement amusant!», s’exclame Isabel Allende, en entrevue de sa maison de Californie. «C’est la première fois que j’écris un thriller et je pense que c’est probableme­nt aussi la dernière. À moins de se dévouer totalement à ce genre littéraire, ça devient une recette: présenter un crime, semer des indices et créer un jeu entre le lecteur et l’écrivain, pour savoir qui va gagner. Si le lecteur devine qui est l’assassin, il gagne. J’ai aimé ce genre, mais ce n’est pas quelque chose que je pourrais faire souvent.»

Ayant en tête une histoire contempora­ine qui allait se dérouler à San Francisco à notre époque, Isabel a assisté à une conférence sur l’écriture de romans policiers. «J’ai appris beaucoup de choses sur le travail d’expertise judiciaire, sur le travail des policiers, sur les enquêtes, sur les armes, sur les poisons... et j’ai rencontré des experts que je pouvais appeler n’importe quand.»

Un de ses amis connaissai­t un «Navy Seal» qui habite dans la région de Washington et Isabel en a fait le héros du roman. «Je lui ai rendu visite pendant trois jours, pour examiner son langage corporel, sa manière de parler, sa coupe de cheveux, regarder ses photos, écouter ses histoires. J’ai tout enregistré. Je n’ai pas eu à inventer un personnage: il était là.»

SOLIDE RELATION

Le jeu de Ripper existe vraiment. «C’est un jeu en ligne. J’ai vu ma petite-fille y jouer, toute seule, dans la cuisine. Il s’agit de partir aux trousses de Jack l’Éventreur à Londres en 1888. J’ai joué quelques parties avec elle et je me suis demandé si je ne pouvais pas inventer un jeu semblable qui se déroulerai­t à San Francisco en 2012.»

Dans le roman, la jeune Amanda a bâti une solide relation avec Blake Jackson, son grand-père. Une relation qui n’est pas sans rappeler celle d’Isabel Allende avec son propre grand-père. «J’ai grandi à ses côtés jusqu’à l’âge de 10 ans. J’y suis retournée à l’âge de 15 ans parce que mes parents étaient en Turquie. J’étais très proche de lui et il a eu une énorme influence sur ma vie. C’était un homme sévère, très strict, mais aimant, à sa manière. Je voulais écrire dans ce livre à propos du grand-père que j’aurais aimé avoir – j’aurais aimé avoir quelqu’un qui m’adorait, qui aurait pris du temps avec moi. J’étais une enfant très solitaire.»

 ??  ??
 ??  ?? Isabel Allende
Le jeu de Ripper Éditions Grasset,
446 pages.
Isabel Allende Le jeu de Ripper Éditions Grasset, 446 pages.

Newspapers in French

Newspapers from Canada