La bonne action de Google
L’annonce récente, par Google, de son initiative pour soutenir le journalisme en Europe fait beaucoup parler: désir sincère d’aider les éditeurs ou exercice de RP ? Sans doute les deux…
Google a annoncé, fin avril, la création d’un fonds européen pour la presse, de 150 millions d’euros (plus de 205 millions $ canadiens) sur trois ans. Nommé Digital News Initiative (DNI), le projet regroupe pour l’instant huit éditeurs: Les Échos en France, FAZ et Die Zeit en Allemagne, The Financial Times et The
Guardian au Royaume-Uni, NRC Media aux Pays-Bas, El Pais en Espagne et La Stampa en Italie. D’autres pourraient les rejoindre en cours de route, a indiqué Google, qui veut implanter les initiatives dans les prochains mois. Le fonds aidera les éditeurs à développer de nouveaux produits, à explorer de nouvelles formes de journalisme numérique, à trouver des avenues plus rentables pour leur contenu… et à former des gens en conséquence.
Mais qu’est-ce qui rend soudain Google tellement soucieuse du sort des médias et de la qualité de leur contenu? Il y a, sans aucun doute, le désir de bien se faire voir, et de se mettre à l’abri de foudres réglementaires. La Commission Européenne a en effet commencé à montrer les dents par rapport à l’utilisation, par Google, de son quasi-monopole en matière de recherche sur le web, pour favoriser certains de ses autres services.
SINCÈRE ?
Mais une autre conclusion s’impose aussi: oui, Google est sincère dans ses intentions. Par nécessité. Elle a beau être un géant, elle concurrence d’autres géants, comme Facebook; pour les clics, et pour l’attention du public sur les appareils mobiles, par exemple. Elle a besoin de s’allier avec les médias qui, depuis de nombreuses décennies, maîtrisent l’expertise en matière de contenu et de journalisme.
Les éditeurs, de leur côté, accordent le bénéfice du doute à leur nouvel allié. De toute façon, ont-ils le choix? «C’est indispensable d’innover dans notre domaine», écrivait, dans The Guardian, Matt MacAlister, directeur général du développement numérique au Guardian Media Group. «Mais sans les moyens de nous réinventer à la base en étant capable d’encaisser les obligatoires échecs, on sera condamnés à faire des changements mineurs, en regardant le vrai progrès arriver ailleurs. On gérerait le déclin, sans pouvoir produire du grand journalisme.»
« MÊME COMBAT »
Google souligne aussi, de son côté, l’importance de cette collaboration. «Google reconnaît et admire le journalisme de qualité», déclarait Carlo D’Asaro Biondo, président des partenariats stratégiques de Google Europe, peu après l’annonce du fonds. «Nous faisons tous partie de l’écosystème de l’information. Nous menons tous le même combat pour trouver des modèles d’affaires viables.»
Et sur le continent américain? Google avait déjà établi, en 2010, un fonds de 5 millions $ US avec la Knight Foundation aux États-Unis. Verra-t-on de telles initiatives s’étendre, et jusqu’à englober les médias canadiens? «La DNI est ouverte à l’industrie de l’information en Europe, m’a répondu le département des communications de Google Canada. Nous n’avons rien d’autre à partager pour l’instant.»
Mais c’est sûrement une question que les médias d’ici seront intéressés à suivre...