Le réseau public gagne du terrain
La multiplication des programmes particuliers et les finances plus serrées de la classe moyenne en cause
Alors que la popularité croissante des écoles privées fait les manchettes depuis des années, voilà que le réseau public reprend du terrain. La proportion d’élèves qui fréquentent les écoles publiques est en hausse depuis trois ans, a appris Le Journal.
Il s’agit d’une première au Québec depuis au moins 10 ans, selon des statistiques obtenues auprès du ministère de l’Éducation.
Ces chiffres traduisent bien la réalité, concède Jean-Marc St-Jacques, de la Fédération des établissements d’enseignement privés. «L’enseignement privé a été en croissance à partir des années 90, mais ce n’est plus le cas. Dans les faits, il y a une décroissance au secondaire et, pour la première fois, on la voit maintenant en pourcentage. Il y a seulement 10 % des écoles privées qui ont des listes d’attente», dit-il.
CONCURRENCE
Ce phénomène pourrait s’expliquer en partie par la création au cours des dernières années de programmes particuliers dans les écoles publiques, qui ont multiplié les concentrations en sports ou en arts pour répondre aux besoins des parents et pour rivaliser avec le privé, ajoute M. St-Jacques.
Un constat partagé par Gérald Boutin, professeur d’éducation à l’Université du Québec à Montréal. «Ces nouveaux programmes ont beaucoup contribué. C’est à partir de ce moment que le public a commencé à reprendre du galon», avance-t-il pour expliquer ce «début de tendance».
Même s’il considère qu’il est encore trop tôt pour affirmer que l’école publique a réussi son pari, M. Boutin voit dans ces chiffres «une mouvance» qui reste toutefois encore «fragile».
LES PARENTS ONT MOINS D’ARGENT
La fréquentation des écoles privées est aussi reliée à la capacité de payer de la classe moyenne, rappelle quant à lui Jean-Pierre Aubry, économiste et fellow associé au CIRANO, le Centre interuniversitaire de recherche en analyse des organisations.
«Les ménages sont de plus en plus endettés, les finances sont donc plus serrées, c’est certain que ça peut avoir un impact», constate-t-il.
M. St-Jacques abonde dans le même sens. Il croit que les coupes dans le financement du transport scolaire, l’an dernier, ont pu peser dans la balance puisque certaines écoles privées ont dû refiler la facture aux familles.
«Il y a une limite à la capacité de payer des parents. Si je leur annonçais demain qu’il faut mettre 500$ de plus, il y a des parents qui ne suivraient pas», dit-il.