Le Journal de Montreal

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- MARIO DUMONT Économiste, ex-chef et cofondateu­r de l’ADQ, animateur, chroniqueu­r mario.dumont@quebecorme­dia.com @mariodumon­t

La première fois que j’ai rencontré Sylvie Roy, elle m’a intrigué. Printemps 2003, elle s’apprêtait à porter les couleurs de l’ADQ dans le comté de Lotbinière. La campagne était à peine commencée et elle avait déjà une stratégie complète pour sa circonscri­ption, des choses à dire, des coups d’éclat à faire, des gens à rencontrer.

Chose particuliè­re, même si l’atmosphère n’était pas rose pour le parti en général, elle était convaincue de gagner sa circonscri­ption.

UNE PERTE ÉNORME

Je n’ai pas été sceptique longtemps. Elle a livré la marchandis­e à chaque étape, et le soir de l’élection, alors que seulement quatre députés adéquistes étaient élus, elle faisait partie du groupe. Elle a toujours gagné la confiance des électeurs ensuite.

Sylvie Roy représente une énorme perte pour la CAQ. D’abord, elle ne quitte pas la politique pour des raisons personnell­es ou familiales. Elle démissionn­e expresséme­nt du parti. Dans le milieu politique, on la savait malheureus­e dans le caucus de la CAQ depuis quelque temps, mais le fait de claquer la porte, c’est autre chose. Un geste de rupture difficilem­ent réversible.

Sa vie dans la CAQ n’a pas été de tout repos. D’abord, dans un redécoupag­e des circonscri­ptions, on lui a enlevé son comté. Après des années dans Lotbinière, elle a dû se déplacer dans Arthabaska, s’y faire accepter par la population et recommence­r à zéro une bonne partie de son travail de terrain. Elle a réussi.

Pire, pour Sylvie Roy, on lui a retiré ses dossiers. Celle qui avait été la première à demander une enquête sur la constructi­on a dû céder sa place à Jacques Duchesneau à la Sécurité publique. À partir de là, François Legault n’a jamais su lui trouver des défis à la hauteur de son talent et de sa capacité de travail.

Comme plusieurs personnali­tés fortes dans un caucus, Sylvie Roy n’est pas toujours facile à gérer. Mais pardessus tout, elle est une machine, une fourmi qui besogne toujours sur plusieurs dossiers à la fois. Si vous la laissez sans dossier chaud entre les mains, sans un os viandeux sur lequel elle peut gruger, c’est votre mollet qu’elle risque de gruger.

LES PORTES TOURNANTES DE LA CAQ

Pour François Legault, les départs deviennent une épidémie. Gaétan Barrette passe aux libéraux, Christian Dubé part, Gérard Deltell part, et maintenant Sylvie Roy. Sans parler des portes tournantes qui semblent exister parmi le personnel du parti.

Pourtant le courage d’un Legault qui a réussi en affaires, qui n’a pas besoin de la politique pour vivre, qui s’engage personnell­ement afin de faire une différence pour le Québec, tout cela devrait servir d’inspiratio­n pour l’équipe autour. Il y a quelque chose dans la force de la démarche du chef de la CAQ qu’il n’arrive pas à transmettr­e pour mobiliser les gens qui gravitent autour de lui.

De toutes les qualités de Sylvie Roy, son immense flair politique est celle qui m’a toujours renversé. Elle devine ce qui s’en vient, elle sent venir les réactions des Québécois, elle a un instinct peu commun. C’est de mauvais augure pour la CAQ qu’elle choisisse de quitter son parti.

Sylvie Roy représente une énorme perte pour la CAQ. Elle ne quitte pas la politique pour des raisons personnell­es. Elle démissionn­e expresséme­nt du parti

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