Le succès d’édition de… Ikea
Ce mois d’août est celui de la publication du plus récent tome d’un ouvrage fort attendu, venu de Suède. Le 4e tome de la série Millenium? Plus imposant encore: l’édition 2016 du catalogue IKEA, dont chaque sortie réussit à créer le «buzz» dans les médias. Cette année, le populaire ouvrage a droit à… sa première critique littéraire.
Le marketing de contenu est maintenant un concept en vogue: comme les consommateurs sont de plus en plus imperméables aux relations publiques et à la publicité «classique», les entreprises tentent de les rejoindre autrement, en s’associant à des contenus susceptibles de les intéresser.
C’est ce qu’a réussi IKEA avec son catalogue, auquel l’entreprise consacre 70% de son budget marketing. Créé en 1951, le catalogue IKEA s’est hissé, avec les années, au rang de succès d’édition mondial: imprimé à 220 millions d’exemplaires, traduit dans 34 langues et distribué dans 49 pays. Sa diffusion atteint désormais le double de celle des Bibles intégrales.
Et, loin d’être vu comme une circulaire qu’on s’empressera de mettre au recyclage, c’est une publication attendue, convoitée, commentée dans les médias, et dont la publication est devenue un événement. Ainsi, IKEA récolte de la couverture médias en diffusant, depuis quelques années, une vidéo montrant le «making of» du fameux catalogue, et qui donne la parole à ses artisans. Cette année, les médias qui l’ont répercuté incluent, en France, l’édition en ligne de Marie-Claire Maison. Plus près de nous, à Québec, où IKEA doit ouvrir bientôt un centre de livraison, le fait que le catalogue ne serait PAS distribué a fait la nouvelle ces dernières semaines.
CRÉER LE buzz
IKEA s’arrange en outre pour, chaque fois, créer un «buzz» sur les réseaux sociaux, dans les médias, avec une initiative particulière. L’an dernier, c’était avec une parodie vidéo, très drôle, des publicités de Apple: on y vantait les vertus de ce concept «révolutionnaire» qu’est le catalogue, avec «technologie tactile», chargement instantané, une batterie qui dure éternellement, etc. Élaborée par l’agence BBH Asie\Pacifique, la vidéo avait vite récolté des millions de visionnements à travers le monde.
Pour l’édition 2016, autre coup viral: à l’agence Wirz Werbung, de Zürich, on s’est avisé que, ce qui manquait encore à cet immense succès d’édition, c’était… une critique littéraire digne de ce nom. On a donc demandé à Hellmuth Karasek, journaliste, auteur et critique littéraire allemand fort respecté, de faire l’exercice avec le célèbre catalogue, dont le titre est cette année Les petites choses font les
grands moments. «C’est un vrai scandale que ce livre, avec un tirage aussi impressionnant, n’ait jamais reçu une critique digne de ce nom», note d’entrée de jeu, sur un ton très sérieux, Hellmut Karasek. Il poursuit avec des phrases telles «Les gens doivent s’immiscer entre les meubles n’ont pas grand-chose à dire, et ce qu’ils disent est très peu cohérent – et pourtant ce livre remporte un immense succès.»
La vidéo qui récolte, encore une fois, une couverture médiatique mondiale a en outre comme répercussion de faire connaître Hellmut Karasek hors de la communauté germanophone.