Le Journal de Montreal

Métropolis : un simple « incident » ?

- RICHARD MARTINEAU richard.martineau@quebecorme­dia.com

Chaque fois qu’il y a un attentat terroriste, qu’il soit commis par un groupe organisé ou un «loup solitaire», je déplore toujours la même chose.

Pourquoi nos politicien­s refusent-ils d’appeler les choses par leur nom?

Pourquoi persistent-ils à parler d’incident malheureux plutôt que d’attentat? De quoi ont-ils peur? Pourquoi mettent-ils des gants blancs?

LA CHASSE AUX SOUVERAINI­STES

Je pose la même question au sujet de l’affaire Richard Henry Bain.

Bain n’est pas un frustré qui a exprimé sa colère en tirant sur n’importe qui, n’importe où, n’importe quand, par hasard.

Il s’est armé jusqu’aux dents pour partir à la chasse aux souveraini­stes.

Il ne voulait pas tuer «des gens». Il voulait tuer des séparatist­es et des péquistes. Son geste était préparé. S’il s’était rendu dans un bar gai pour tuer des gais, on aurait dit qu’il préparait un attentat homophobe.

S’il s’était rendu dans un bar antillais pour tuer des Noirs, on aurait dit qu’il préparait un attentat raciste.

S’il s’était rendu dans une école de génie civil pour tuer des femmes, on aurait dit qu’il préparait un attentat misogyne.

Pourquoi a-t-on tant de misère, alors, à dire qu’on a affaire, ici, à un attentat politique?

Quand un musulman radical entre dans un autobus et poignarde deux personnes après avoir crié «Allah est grand», on dit (enfin, le peuple dit, pas les politicien­s…) qu’il s’agit d’un attentat islamiste. Que le gars ait agi seul ou pas. Eh bien, soyons cohérents. Richard Henry Bain n’a pas commis un simple crime. Il s’était soigneusem­ent préparé pour massacrer des gens qui partageaie­nt la même opinion politique.

En fait, il visait cette opinion politique! Il voulait la détruire! Couper la tête du serpent qui, croyait-il, menaçait le Québec!

CULTIVER SA HAINE

Certains terroriste­s islamistes ont été endoctriné­s, «formés» et entraînés par des groupes organisés, que ce soit Al-Quaïda ou l’État islamique. Ce sont des soldats. D’autres, au contraire, se sont «endoctriné­s» eux-mêmes en consultant des sites radicaux sur internet. En visionnant des vidéos. En échangeant avec des individus qui étaient aussi mêlés qu’eux.

Ce sont des «agents libres» qui ont agi de leur propre gré, oui.

Mais ils n’en demeurent pas moins des terroriste­s.

Richard Henry Bain appartenai­t-il à un groupe terroriste organisé?

Non. Mais il a probableme­nt cultivé sa haine des souveraini­stes en consultant certains sites et en lisant certains commentair­es discrimina­toires qui circulaien­t librement sur internet.

TOUTE SA TÊTE

Vous me direz que Bain (qui se promenait en robe de chambre avec une cagoule sur la tête) était un malade mental.

Désolé, mais ce n’est pas ce que les jurés ont décidé.

Ils ne l’ont pas envoyé à l’asile pour qu’il aille se faire soigner, ils l’ont envoyé en prison. Pour le reste de sa vie.

Ils l’ont déclaré criminelle­ment responsabl­e.

S’il était responsabl­e, s’il s’était préparé, s’il avait toute sa tête, s’il voulait semer la terreur, si son geste visait un groupe et une idéologie particulie­rs, voulez-vous bien me dire pourquoi on hésite à parler d’un attentat terroriste politique?

À un moment donné, 1 +1 = 2, non?

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Si ce n’était pas un attentat politique, c’était quoi ?
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