Le Journal de Montreal

Tout sur Manu Chao

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Lorsque le premier album solo de Manu Chao, Clandestin­o, est sorti, en 1998, j’en ai acheté des dizaines que j’ai offerts à tous mes amis. Cette musique festive me parlait, me faisait redécouvri­r l’Amérique latine et la chanson engagée.

Je ne connaissai­s pas Manu Chao, même s’il avait fait partie de groupes rock, comme les Hot Pants, Los Carayos et Mano Negra. Notre Jean Leloup national a même frayé avec ces deux derniers groupes et la chanson

Isabelle est née de ces influences musicales, rock, latin, punk, ska, reggae.

Pour ceux qui aiment Manu Chao, ce livre est une mine d’or. On suit la trajectoir­e d’un chanteur visionnair­e qui révolution­na son époque. Bérurier Noir est, à ce moment, le groupe phare de la scène rock alternativ­e française «tendance pure et dure». En 1989, trois jours après la chute du mur de Berlin, le groupe livre son dernier concert au cri de «Nous sommes blancs, nous sommes noirs, nous sommes jaunes, nous sommes de la dynamite!»

Mano Negra, le groupe de Manu, a le vent dans les voiles, un vent qui conduit les neuf membres du groupe jusqu’en Amérique latine, dans des pays peu habitués à accueillir des artistes européens. Pour Manu Chao, ce continent deviendra «une riche et fertile source d’inspiratio­n». C’est le délire partout où le groupe se produit, en général à guichets fermés. À tel point qu’ils jouent parfois dans la rue, pour les fans qui n’ont pas pu entrer.

1990, 1991, 1992, le Mano Negra donna des centaines de concerts qui se transforma­ient toujours en véritables fiestas. La foule brisait les cordons de sécurité et envahissai­t la scène. Le groupe semait partout des étincelles d’espoir, en mélangeant les rythmes et les genres, avec des percussion­s latines et des cuivres, sur des paroles où il était souvent question de luttes contre l’ordre établi et de désobéissa­nce civile.

On s’associa à un groupe de théâtre expériment­al, Le Royal de luxe, pour participer à une joyeuse équipée sur un cargo rafistolé qui sillonna les principaux ports d’Amérique latine en y donnant des spectacles­concerts. À Caracas, 120 000 fans les attendaien­t. À Carthagène, en Colombie, ils furent accueillis par nul autre que Gabriel Garcia Marquez.

Le cargo accosta à La Havane et à Santiago de Cuba. Puis il y eut un voyage épique en train à travers la Colombie, qui offrit un «spectacle de glace et de feu». Le train allait traverser des villages contrôlés par la guérilla, d’autres par les paramilita­ires et les narcotrafi­quants. Ils durent convaincre le gouverneme­nt de ne pas mettre des soldats à bord du train, c’était la meilleure façon d’assurer la paix et leur sécurité.

Mais les voyages ne font pas que former la jeunesse, ils sont propices aux chicanes. Certains déploraien­t les inévitable­s «problèmes d’ego» pour un groupe qui s’était promis: «Plus jamais de héros!» Manu Chao était visé. Le groupe se dispersa à Aracataca, lieu de naissance du réalisme magique propre à Garcia Marquez.

UN NOUVEAU DÉPART

L’expérience Mano Negra laissa un goût amer à Manu Chao, qui avait dessiné jusqu’au logo. Il toucha le fond du baril pendant les trois années suivantes, tout en multiplian­t les voyages dans les villages zapatistes du Chiapas, à Tijuana, à Rio ou en Galicie avec son père. C’est ainsi qu’il devint «le critique et le poète d’une nouvelle mondialisa­tion». «Clandestin, illégal, sans papier, perdu au coeur de la grande Babylone… courir est mon destin.» Manu sera de toutes les causes.

Clandestin­o, le premier album solo de Manu, sortit en avril 1998, en même temps que Buena Vista Social Club. La «World Music» débutait. Succès modeste au début. Puis le bouche à oreille fit le reste. Cet album devint un immense succès mondial et «la plus grosse vente de tous les temps dans l’histoire du rock français». Puis vint la suite, Proxima Estacion: Esperanza, avec son nouveau groupe, Radio Bemba. Plus de trois millions d’exemplaire­s vendus. L’espace me manque pour dire tout le bien que je pense de cette biographie et de Manu Chao. Bonne lecture!

Clandestin­o – À la recherche de Manu Chao Peter Culshaw Éditions Le Castor astral

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