12,7 M$ pour les projets de sa conjointe
Pendant que Laurent Lessard était aux Affaires municipales, son ministère a donné…
Québec a versé des millions en subventions pour des projets sur lesquels travaillait la conjointe de Laurent Lessard, au moment où ce dernier dirigeait le ministère des Affaires municipales.
Sans les millions versés par le programme Accès logis, Johanne Binette n’aurait pas de travail, car l’entreprise qui l’embauche ne pourrait pas fonctionner. Mme Binette occupe depuis mars 2011 un poste de chargée de projets au Groupe ressources techniques Beauce-Appalaches (GRTBA), à Thetford Mines, dans la circonscription de Laurent Lessard.
Pendant que ce dernier était ministre aux Affaires municipales entre 2009 et 2012, cinq projets d'habitation communautaire menés par le GRTBA ont été approuvés par le ministère pour un total de 12,7millions$. Deux d’entre eux ont même été approuvés en juillet 2012, quelques semaines avant l’élection provinciale, nous apprend le site web de l’entreprise.
PAs GÂtÉE PAr « LAurENt »
Ces cinq projets ont été menés à terme après l’embauche de Johanne Binette.
Depuis, l’entreprise a été beaucoup moins gâtée. Seulement trois projets ont été annoncés en quatre ans. L’un d’eux, à SaintFerdinand, vient d’être réduit de 24 à 16 unités.
La directrice de l’entreprise d’économie sociale, qui désigne le ministre par son prénom, prétend ne pas avoir été gâtée pendant qu’il était en poste. «Le temps que Laurent était aux affaires municipales et que Johanne était au bureau, je n’ai jamais eu d’unités pendant ce temps-là», dit Josée Durand. Pourtant, son site web indique le contraire.
Le ministre soutient avoir signalé la nature de l’emploi de sa conjointe dans la déclaration envoyée au commissaire à l’éthique (voir autre texte).
Laurent Lessard a perdu son poste de ministre en septembre 2012 dans la foulée de la victoire du Parti québécois.
Jointe à sa résidence de Thetford Mines, Mme Binette n’a pas voulu faire de commentaires. «Adressez-vous à mon conjoint à ce moment-là. Je n’ai pas à répondre à
vos questions», a-t-elle ajouté.
suBvENtIONs CONvOItÉEs
L’entreprise ne compte que trois employés. Josée Durand assure que Mme Binette a été embauchée pour son expertise. «Johanne, elle ne faisait pas de démarchage et même si elle en avait fait, ça ne m’aurait pas dérangé non plus», dit-elle.
Les organismes qui souhaitent construire des habitations communautaires dépendent largement des subventions de Québec. Sans ces subventions, il n’y aurait pas de travail pour le Groupe ressources techniques Beauce-Appalaches, admet Josée Durand.
Malgré tout, celle-ci jure ne pas avoir parlé des projets avec Laurent Lessard, qu’elle a croisé régulièrement. Pour ce qui est de Johanne Binette, elle ne sait pas. «Ce qui se passe chez eux, ça ne me regarde pas ça».
APPArENCE DE CONFLIt D’INtÉrÊts
Pour le spécialiste en éthique, Michel Séguin, l’apparence de conflits d’intérêts est assez claire. «Dans ce cas-ci, il n’y a pas nécessairement de perte liée à une mauvaise décision, mais une perte de crédibilité qui fait mal. Il y a un certain cynisme à l’égard des politiciens, c’est pourquoi j’invite le monde politique à être très prudent.»