Trump et Clinton : au-delà des slogans
Le débat entre Donald Trump et Hillary Clinton était attendu partout sur la planète. L’un des deux sera bientôt élu président des États-Unis.
... les élites américaines sont responsables d’avoir laissé se développer une immense frustration dans leur pays
Au Québec aussi, on attendait l’événement. Mais ici, les jeux sont faits.
Si la présidentielle américaine se tenait au Québec, la candidate démocrate écraserait son rival avec 90 % d’appuis. Trump ne recueillerait les votes que des personnes absolument hostiles au système.
Mais il se trouve que ce ne sont pas les gens de Montréal, de TroisRivières ou de SaintHyacinthe qui voteront en novembre, mais les Américains.
Et si Hillary Clinton est favorite dans la course, elle n’est pas assurée de sa victoire.
RÉVOLTE
Aussi bien chercher à comprendre pourquoi.
Il faut dire que l’explication voulant que les Américains soient entraînés dans un grand délire nous vient directement du sud de la frontière.
Est-ce que l’électorat de Trump est composé, comme le suggérait récemment Hillary Clinton, à moitié de désespérés et à moitié de maniaques?
On se souvient de l’accusation de Clinton, qui présentait les appuis de Trump comme un ramassis de racistes, de sexistes, d’homophobes et d’islamophobes.
Elle ne semblait même pas se rendre compte que c’est ce genre d’attitude qui pousse par millions les électeurs dans le camp de Trump.
À présenter ceux qui s’inquiètent de l’immigration massive comme des racistes, c’est une bonne partie de la population qu’on pousse à la révolte.
De même, ceux qui souhaitent limiter la mondialisation et protéger les industries américaines ne sont pas des socialistes régressifs hostiles à l’économie de marché.
Ce n’est pas un fascisme américain qui pousse Trump vers la MaisonBlanche. C’est la profonde révolte de grandes couches de la population contre leurs élites.
Ce sont des catégories sociales qui se sentent abandonnées ou déclassées par une mondialisation sans frontières ni patries.
Trump s’est présenté comme le grand outsider, celui qui défie les élites ouvertement.
Il a multiplié les provocations qui firent toutes autant de scandales médiatiques.
Mais plus le système médiatique le dénonçait, et plus ceux qui se sentent exclus de la politique américaine étaient tentés par lui. Le raisonnement? Un homme aussi détesté ne peut pas être si mauvais.
Cette stratégie lui a permis de s’emparer du Parti républicain. Mais peutelle le conduire plus loin?
BON SENS
Les Américains, au dernier moment, ne risquent-ils pas de se dire que ce personnage, dont ils se sont servis pour envoyer un signal d’alarme au système, est néanmoins toxique, fantasque et dangereux?
N’auront-ils pas un réflexe de bon sens au dernier moment en laissant aux portes du pouvoir celui qui n’est manifestement pas taillé pour la présidence des États-Unis?
Une chose est certaine, toutefois: les élites américaines sont responsables d’avoir laissé se développer une immense frustration dans leur pays.
Inégalités sociales effrayantes, tensions raciales exacerbées, immigration massive, déclin de prestige international, frénésie consommatrice qui témoigne d’un terrible vide spirituel: dans un pays traversé par autant de crises, fallait-il s’attendre à une élection paisible?
Dans un monde en crise, la politique redevient inévitablement tumultueuse.