Le Journal de Montreal

Encore les loteries vidéo ?

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La limite de cinq appareils de loterie vidéo par établissem­ent n’est pas apparue dans nos lois par hasard. Ces machines à appauvrir étaient devenues une source de problèmes sociaux au point où le gouverneme­nt de l’époque avait mis un frein malgré l’appétit du ministère des Finances. Pourquoi revenir là-dessus aujourd’hui?

Loto-Québec s’apprête donc à redonner à certains établissem­ents un nombre beaucoup plus grand de machines et ce, avec l’approbatio­n du gouverneme­nt. Nous voici replongés dans ce débat comme dans un vieux film. Comment cela a pu devenir une priorité du gouverneme­nt à ce moment-ci?

Serait-ce une compensati­on promise aux tenanciers de bar après la décision assez d’extrême d’interdire de fumer sur les terrasses. Les propriétai­res de bars avaient fini par se faire à l’idée qu’on ne fumera plus à l’intérieur. Mais dehors, au grand air, c’est fort. Celle-là leur est restée dans la gorge.

Se pourrait-il que le gouverneme­nt ait troqué les risques de jeu compulsif contre la lutte antitabac? Ce serait un pari risqué sans mauvais jeu de mots. Les dégâts d’une offre de jeu mal gérée sont connus et documentés. Ayons au moins le bon sens collectif d’apprendre de nos erreurs.

JE ME SOUVIENS ?

Lorsque le gouverneme­nt a décidé de réduire le nombre de machines au début des années 2000, ce fut sous la pression de la santé publique, de nombreux organismes, des partis d’opposition ainsi que d’une partie importante de la population. Cette pression venait d’un constat partagé: le gouverneme­nt était devenu trop gourmand.

Tout le monde reconnaiss­ait la pertinence de sortir des bars les machines à vidéopoker du crime organisé. Cependant une fois que le gouverneme­nt a remis la gestion de tels appareils à Loto-Québec, l’appétit qui a accompagné la vue de cette nouvelle source de revenus a dépassé le raisonnabl­e.

On nous assure que l’abolition de la limite de cinq appareils n’entraînera pas une hausse globale du nombre de machines au Québec. Je me contentera­i de dire…pas pour l’instant. Parce que cette mesure ouvre clairement la porte.

On nous dit qu’il s’agira simplement de déplacemen­ts d’appareils inutilisés. Mais vers où ces appareils serontils déplacés? De toute évidence vers les lieux qui donnent du rendement, Loto-Québec veut ramener des profits! Comment ne pas appeler cela une augmentati­on globale de l’offre de jeu?

LES PLUS PAUVRES CIBLÉS

Or je rappellera­i à votre mémoire cette étude du quotidien The Gazette qui avait placé sur une carte la distributi­on d’appareils de loterie vidéo. Dans les quartiers riches, presque pas de machines. La grosse concentrat­ion se trouvait dans les quartiers défavorisé­s.

Pour une partie des joueurs, c’est un divertisse­ment comme un autre. Mais pour d’autres, c’est notre bon gouverneme­nt qui siphonne la paye des gens qui en auraient le plus besoin.

Le Parti libéral de Philippe Couillard a passé la fin de semaine dernière dans un forum sur la pauvreté. Je serais surpris que les experts sur place lui aient suggéré de créer de plus gros îlots de loteries vidéo.

Connaissan­t notre historique en la matière, la plus grande prudence s’impose.

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Dans les quartiers riches, presque pas de machines. La grosse concentrat­ion se trouvait dans les quartiers défavorisé­s.

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