Le Journal de Montreal

D’opérateur à magnat du textile

Parti de rien, il employait 400 personnes avec sa compagnie de textile en Beauce dans les années 1990 Certains ont grandi au Québec dans un milieu modeste, d’autres ont traversé l'océan avec presque rien dans les poches pour immigrer. Le Journal a rencon

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«On en a mangé du baloney», s’exclame la fille de Réginald Fecteau, un entreprene­ur qui a misé jusqu’à sa maison pour démarrer sa compagnie de textile dans les années 1970. Ce Beauceron en a bavé avant que sa manufactur­e devienne une des plus importante­s au pays. «Des fois, rendu chez nous, je pleurais», se souvient l’homme de 76 ans, qui est parvenu à bâtir à partir de rien une compagnie employant 400 employés dans les années 1990. Originaire de SaintVicto­r-de-Beauce, M.Fecteau est le fils d’une famille de «patenteux». Son grandpère possédait un moulin à scie, raconte-t-il. Allergique à la routine et un peu hyperactif, M.Fecteau n’était pas très intéressé par l’école et a donc arrêté ses études après le 5e secondaire. «Après, je suis allé à l’université de la vie», rigole-t-il.

Dans les années 1950, l’adolescent commence à travailler pendant les vacances scolaires comme opérateur et vendeur pour une compagnie de récupérati­on de vieux tissus. Il gravit progressiv­ement les échelons, devenant même contremaît­re. Il s’occupe alors de l’achat des matières premières.

En 1976, après 20 ans de service, lui et son beau-frère décident de fonder leur propre compagnie, Textile Du-Re.

PLUS GROSSE AU CANADA

Les quatre premières années ont été une période de vache maigre, se souvient sa fille Lisa Fecteau, qui dirige aujourd’hui l’entreprise familiale. «Mes parents avaient tout misé [sur la compagnie], même la maison. C’était un stress énorme», raconte-t-elle.

Si elle n’a jamais vraiment manqué de l’essentiel, elle se souvient que sa mère lui cousait des vêtements quand elle était adolescent­e par manque de moyens pour en acheter. Une situation ironique pour une famille vivant du textile.

Puis un jour, la petite famille a pu prendre des vacances et aller en camping, se souvient-elle. Progressiv­ement, les sacrifices ont commencé à rapporter. Dans les années 1990, ses parents ont pu agrandir la maison, profiter de la vie, faire des voyages, raconte-t-elle.

«On a pu faire une petite fortune. Mais on n’était pas millionnai­re, dit M. Fecteau. C’était pas le pétrole», précise-t-il.

Reste que la compagnie Textile DuRe avait pris une ampleur sans commune mesure avec ce qui existait avant en Beauce. «En 1998, on était la plus grosse compagnie de textile au Québec et même au Canada», estime M. Fecteau.

Les deux usines produisaie­nt 400000livr­es de fil par semaine et fonctionna­ient 24heures sur 24, indique-t-il. «Je travaillai­s 18 heures par jour. On ne pouvait jamais relaxer. Ça cogitait tout le temps dans mon coco», se souvient-il.

SANS RÉPIT

«Même la nuit, ça me réveillait. Il y avait toujours mille sortes de problèmes.» La liste est longue: les clients mauvais payeurs, les clients qui font faillite, les produits qui fonctionne­nt mal, les employés difficiles.

Malgré tout, M. Fecteau savait déléguer. Il a d’ailleurs confié les rênes de Regitex, une toute nouvelle entreprise de textile, à ses deux enfants dans la trentaine. C’était en 1998, alors qu’il venait tout juste de vendre sa part de Textiles Du-Re à son associé.

«Il nous a donné beaucoup d’argent pour démarrer de zéro. De l’argent qu’il avait gagné à la sueur de son front», se souvient Lisa Fecteau.

Contrairem­ent à sa première entreprise, Regitex est spécialisé dans les textiles haut de gamme qui nécessiten­t une technologi­e de pointe, comme le kevlar, utilisé notamment dans les vêtements de pompiers. Regitex emploie aujourd’hui 115 personnes dans une industrie où il y a peu d’acteurs, explique Mme Fecteau.

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Réginald Fecteau en 2016. Pour sa fille Lisa, qui est aujourd’hui présidente et directrice de Régitex, son père est une inspiratio­n.

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