Le Journal de Montreal

Ce que j’ai vu

- Claude villeneuve claude.villeneuve@quebecorme­dia.com

Sexe et politique ont toujours été liés. Quand le pouvoir s’ajoute à l’équation, on ne parle toutefois plus de séduction, mais d’agression.

Des mains qui s’attardent sur les épaules des femmes déjà assises quand le député entre dans la pièce; une accolade qui descend pas mal bas sur la taille pendant un 5 à 7. «Que veux-tu, il est comme ça, ce monsieur-là!»

Des députés qui aiment bien être vus sur la Grande Allée avec des femmes jeunes et jolies; un élu dans un congrès qui invite une employée à monter à sa chambre sans qu’on sache si son ton accepterai­t un non. Tout le monde raconte déjà qu’elle a eu son job en couchant, de toute façon.

Un ministre qui veut une attachée de presse plus jeune et plus belle; un autre dont la femme exige que cette position soit occupée par un homme, car elle connaît son mari.

Ça, c’est ce que j’ai vu en travaillan­t au Parlement.Évidemment, quand ça va jusqu’au viol, il y a rarement des témoins.

Mais oui, il y a une culture du viol en politique.

CHANGER LA CULTURE

Quand le nom de la personne accusée par Alice Paquet est sorti, tout le monde qui connaît le milieu a dit «on le savait». «Mais pourquoi n’avez-vous pas dénoncé?» a-t-on répondu.

Minute, ce n’est pas si simple. Comme employé ou comme collègue, tu peux avoir été témoin de gestes déplacés. Hélas, tu ne peux pas aller voir les journalist­es ou la police en racontant: «Lui, c’est rien qu’un maudit taponneux.» Ils ne pourraient rien faire avec ça.

Ce qu’on peut faire – et qu’on ne fait pas souvent –, c’est exprimer notre désaccord. Ne pas rire ou prononcer soi-même la blague de bonhomme. À ça, je plaide coupable.

Surtout, ne pas adopter les mêmes comporteme­nts par mimétisme, pour faire partie de la tribu. Changeons la culture, un nouveau venu à la fois et en y amenant plus de femmes, en passant.

Il demeure néanmoins, même si c’est malheureux qu’il en soit encore ainsi, que les hommes ont une grosse responsabi­lité par rapport à ça.

AILLEURS AUSSI

Ce n’est pas propre à la politique. C’est comme ça dans la restaurati­on, la musique, le cinéma, les grands médias. Partout où il y a des rapports de pouvoir, voire de domination, comme nous l’enseigne Me Aubut.

Je ne dis pas ça pour banaliser ce qu’il se passe à Québec. C’est le contraire. Je veux montrer que le problème est beaucoup plus vaste et donc plus grave.

Mais oui, il est normal que l’on scrute d’abord la politique. C’est un milieu que nous suivons déjà au jour le jour et ça nous appartient collective­ment.

Cela dit, est-ce que ça nous amènera à questionne­r et à faire le ménage dans les autres secteurs de la société? J’aimerais croire que oui.

Mais oui, il y a une culture du viol en politique

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