Le Journal de Montreal

L’horreur selon Nick Cutter

Juste à temps pour l’Halloween, la maison Alto édite un roman à glacer le sang qui ne s’adresse vraiment pas aux âmes sensibles.

- KARINE VILDER

Si on a envie de lire une histoire d’horreur digne des meilleurs films de David Cronenberg ou de John Carpenter, difficile de trouver mieux que Troupe 52, le tout premier thriller carrément cauchemard­esque de Nick Cutter.

Craig Davidson, l’écrivain qui se cache derrière ce tranchant pseudonyme, est cependant très loin d’en être à ses premières armes: depuis que j’ai a dévoré De rouille et d’os ou Cataract City, il fait même partie de mes auteurs canadiens préférés!

«Nick Cutter a vu le jour lorsque j’ai ressenti l’envie d’écrire un vrai roman d’épouvante, explique-t-il lors de l’entretien téléphoniq­ue qu’il nous a accordé début octobre. J’ai grandi en lisant tous les livres de Stephen King, d’Anne Rice ou de Dean Koontz, et c’est un genre que je connais bien. J’ai donc rédigé Troupe 52 en six semaines et, ensuite, je l’ai envoyé à un agent, qui m’a conseillé de le publier sous un autre nom à cause du sujet [qui n’a rien à voir avec ce que Craig Davidson écrit d’habitude] et de son style, nettement moins littéraire. Depuis 2014, Nick Cutter me permet ainsi régulièrem­ent de donner libre cours à mes idées les plus horribles. Ce qui me procure un plaisir fou, parce que je n’ai pas à me demander si je pousse le bouchon un peu trop loin. En fait, plus j’en rajoute, plus ce sera apprécié!»

Une faim sans fin

Même si la principale devise scout est «Sois prêt», aucun des membres de la petite troupe dirigée par le chef scout Tim Riggs n’a jamais été préparé à affronter le pire.

Chaque année, juste avant la reprise des classes, tout le groupe débarque en effet à Falstaff, une île inhabitée située à 15 km de l’île du prince Édouard, où il n’y a franchemen­t pas grand-chose à faire à part chasser les moustiques, s’aventurer dans des sentiers mal balisés, manger des guimauves brûlées ou, une fois la nuit venue, jouer à celui qui racontera l’histoire la plus terrifiant­e.

Mais aussi imaginatif­s soient-ils, les cinq garçons de la troupe 52 ne tarderont pas à découvrir que la réalité peut parfois dépasser la fiction… surtout lorsqu’un inconnu à l’air hagard vient frapper à la porte de leur camp de base.

«Les grandes lignes de cette intrigue me sont venues alors que je venais de m’installer à Toronto avec ma femme, précise Craig Davidson. Pour prendre le pouls de la ville, nous sommes allés faire un tour au Musée royal de l’Ontario, où il y avait notamment une exposition sur l’eau. Et dans l’une des salles consacrées à cette exposition, j’ai pu voir un film portant sur les ténias [communémen­t appelés vers solitaires]. Ils m’ont littéralem­ent fasciné parce qu’en plus d’être étrangemen­t beaux, ils font partie de ces parasites capables de se reproduire et de survivre dans le corps d’un hôte.»

En voyant arriver cet inconnu complèteme­nt décharné réclamant à grands cris de la nourriture, le chef Tim comprend du premier coup d’oeil que l’homme qu’il a devant lui est sûrement gravement malade. Reste à savoir s’il souffre d’une forme avancée de cancer ou si le mal qui le ronge est contagieux.

Pressé par l’urgence de la situation, Tim Riggs prendra ainsi la pire décision de sa vie: accueillir le bonhomme pour lui donner à manger… sans se douter que l’essentiel de ses victuaille­s allait de ce fait anormaleme­nt vite y passer.

DU gore à satiété

«Il y a deux genres de tueurs, ajoute Craig Davidson. Ceux qu’on peut voir et qu’on peut fuir, et ceux qu’on ne peut pas voir parce qu’ils sont en nous. Dans le deuxième cas, c’est carrément terrifiant puisqu’il n’y a aucun moyen de leur échapper: où qu’on aille et quoi qu’on fasse, ils nous suivent partout sans laisser de traces.»

Soucieux de protéger les garçons dont il a la charge, Tim Riggs aura toutefois le réflexe de les enfermer dans leur chambre dès que l’inconnu franchira le seuil du campement. Ce qui ne fera hélas que retarder de quelques heures l’épouvantab­le cauchemar qui les attend.

Au réveil, après avoir réussi à forcer la porte du dortoir, ils seront de fait instantané­ment confrontés à une scène presque dantesque: une lumière blafarde, une pièce sens dessus dessous puant la mort, un…

Désolée, mais je dois m’arrêter là! De un parce que je préfère vous laisser le soin de découvrir par vous-même ce que Craig Davidson entend par «plus j’en rajoute, plus ce sera apprécié», de deux parce que cet article pourrait tomber entre les mains de jeunes enfants. Car même si je me suis littéralem­ent régalé en dévorant Troupe 52, certains passages ont vraiment réussi à me soulever le coeur. À tel point que, cette année, à l’Halloween, je me promets de ne pas acheter un seul bonbon en forme de verre de terre.

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Nick Cutter, aux Éditions Alto, 432 pages, En librairie le 18 octobre
Troupe 52 Nick Cutter, aux Éditions Alto, 432 pages, En librairie le 18 octobre

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