Tollé chez les employés et les fournisseurs
Une augmentation qui crée des remous partout au Québec
«Ignobles», «mauvais gestionnaires», «honteux»: la spectaculaire hausse de rémunération que se sont payée les dirigeants de Bombardier malgré ses difficultés suscite l’indignation des employés et fournisseurs rencontrés par Le Journal, s’exprimant sous le couvert de l’anonymat pour éviter des représailles.
Les travailleurs et fournisseurs de l’entreprise ne se gênent pas pour critiquer l’augmentation de salaire de 48 % des six grands patrons de Bombardier, qui survient après des milliers de mises à pied et de l’aide de plusieurs milliards $ de Québec et Ottawa.
«Le gouvernement Couillard devrait demander un remboursement. Il s’est fait avoir», lance John, un employé rencontré devant des installations situées près de l’aéroport Montréal-Trudeau.
Cette décision démontre «l’hypocrisie» de Bombardier, estime un autre. «Je pensais que nous étions en difficultés. S’ils sont capables de recevoir des hausses, on devrait recevoir les mêmes», lance-t-il, «amer».
« SITUATIONS IMPOSSIBLES »
Même son de cloche chez des fournisseurs, qui sont souvent «mis dans des situations impossibles», selon l’un d’eux, qui a fait affaire avec le constructeur pendant presque 15 ans.
«Avoir Bombardier comme client, c’est courir le risque de tout perdre, de faire faillite, régulièrement. C’est accepter de faire des profits extrêmement minces et de devoir attendre jusqu’à 250 jours pour être payé», explique cet ancien fournisseur d’équipements électroniques spécialisés.
Pendant des années, il dit avoir eu de la difficulté à payer ses propres employés à cause des délais pris par Bombardier pour payer ceux qui lui procurent des pièces ou de l’équipement. «On est forcés d’aller voir la banque pour payer nos gens. Quand on dit à Bombardier que ça n’a pas d’allure, ils nous disent qu’ils vont aller ailleurs.»
FAILLITE
Il y a trois ans, CEIT Interioriste de Saint-Hyacinthe, spécialisé dans l’aménagement de véhicules ferroviaires, avait déclaré faillite après avoir perdu un contrat de Bombardier. L’entreprise ne disposait pas des liquidités pour payer ses propres fournisseurs.
Interrogé à savoir ce qui expliquait ces délais, Bombardier s’est fait évasif. «Les détails des paiements qu’effectue Bombardier sont confidentiels, cependant, la fréquence des paiements est conforme aux normes de l’industrie et à nos conditions contractuelles», a indiqué le porte-parole de Bombardier, Simon Letendre.