UN DÉFI BUDGÉTAIRE POUR LE QUÉBEC
Le vieillissement de la population et la hausse salariale des médecins posent un risque
QUÉBEC | Le gouvernement Couillard nage présentement dans les surplus, mais un danger guette les finances publiques en raison du vieillissement de la population conjuguée à la hausse salariale des médecins.
Dans le cahier des renseignements additionnels du budget Leitao, le gouvernement du Québec présente plusieurs données alarmantes. On souligne que la population du Québec vieillira de façon accélérée à partir de 2017, note-t-on: en 2036, plus du quart de la population aura plus de 65 ans, alors que cette proportion n’était que de 6,8 % en 1971.
En parallèle, l’État prévoit que l’augmentation de ses revenus va plafonner à 2,6% par année d’ici 2022, contre 4,4% durant l’ère Charest (2003-2012). Québec ajoute un autre tableau: les dépenses de santé du gouvernement par groupe d’âge. La courbe laisse entrevoir une hausse marquée des coûts en santé puisque les frais augmentent rapidement à partir de 60 ans.
Cette situation pourrait provoquer des pressions énormes sur les finances de l’État.
« FAIRE PEUR AU MONDE »
Un spécialiste met toutefois ces données en perspective. «C’est le graphique pour faire peur au monde», note François Béland, spécialiste en gérontologie et professeur à l’école de Santé publique de l’Université de Montréal. «Souvent, ce graphique est interprété comme: regardez, ce sont les personnes âgées qui coûtent tellement cher et qui vont nous ruiner», peste-t-il.
Il souligne d’ailleurs que les hausses de budget en santé n’ont pas bénéficié aux aînés. «Là où les personnes âgées vont coûter davantage, c’est surtout en soins de longue durée. Les fameux CHSLD. Mais ce ne sont pas ces budgets qui augmentent: depuis 2000, la fréquentation des CHSLD et la longueur des séjours diminuent. Le taux de croissance est négatif et le gouvernement a mis le couvercle sur la poubelle. Alors aujourd’hui on a des scandales (de mauvais traitements) qui sortent de partout», déplore-t-il.
SALAIRE
L’expert pointe plutôt du doigt le salaire des médecins pour trouver la cause de l’augmentation des coûts en santé. «Le Québec a toujours eu une part très stable de ses dépenses en santé en fonction du PIB». Tout a changé lorsque l’ancien ministre de la Santé Yves Bolduc a signé une juteuse entente de rattrapage avec les médecins. Gaétan Barrette était président du syndicat. «Il les a arrangés pour de vrai», dit-il.
Il estime que près 50% des hausses de budget de la santé depuis sont directement attribuable à cette bonification.
Pour se sortir du pétrin et pour éviter la «catastrophe humaine», il recommande au gouvernement d’agir rapidement pour changer la culture du réseau. «C’est moins un problème de financement que d’orientation, qui risque de nous emmener à la catastrophe», note-t-il.