Une radiographie du Québec
Le Québec a changé radicalement, surtout à partir des grands bouleversements survenus après la Deuxième Guerre mondiale et la Révolution tranquille. «Les porteurs d’eau d’autrefois sont un lointain souvenir», affirme l’auteur.
Lorsque j’étais éditeur, je rêvais de publier un almanach nouveau genre, rajeuni, pour remplacer le vieil Almanach du peuple des éditions Beauchemin qui nous bombardait de toutes sortes de statistiques et surtout de prévisions qui tenaient davantage des prédictions de Madame Minou, sans fondements scientifiques.
L’auteur du présent ouvrage a été professeur de sociologie pendant 40 ans. Tout au long de sa pratique universitaire, il a publié des chroniques sur différents thèmes, qu’il reprend dans cet ouvrage, que je pourrais comparer à cet almanach revampé que je souhaitais éditer à l’époque.
Il ne faut pas se laisser rebiffer par quelques mots apparentés au jargon universitaire comme stratification sociale, approche marxiste ou les allusions aux travaux de Max Weber et Alexis de Tocqueville, car l’ouvrage, malgré son côté savant, est éminemment abordable pour qui veut découvrir rapidement un portrait du Québécois d’aujourd’hui et de la société où il évolue, dans un monde en mutation constante. Ça nous change des statistiques canadiennes et autres sondages où la spécificité québécoise est biffée au profit du grand tout canadien.
MIEUX SE CONNAÎTRE
Se regarder dans le miroir à travers l’oeil rigoureux du chercheur n’a rien de narcissique. Au contraire, nous apprenons à nous découvrir sous un autre angle, avec nos travers et nos défauts, pour mieux les corriger. Nous sommes, dit l’auteur, environ 4 millions de personnes à travailler, alors qu’en 1971 la population active était de 1,9 million de personnes. Parmi ceuxci, on trouve moins de travailleurs manuels et plus d’employés dans les services aux personnes (services alimentaires, services personnels, services en santé et en éducation). Les nombreuses garderies créées au cours des 20 dernières années y sont pour quelque chose et expliquent l’augmentation des femmes sur le marché du travail. Celles-ci peinent encore à atteindre les plus hauts échelons des grandes entreprises et sociétés d’État. Il serait plus facile pour les patrons et dirigeants masculins de partager les tâches domestiques avec leurs conjointes, alors que le contraire est plus difficile, la femme hésitant «à tout sacrifier pour avancer coûte que coûte». Les femmes seraient davantage présentes dans les secteurs de l’éducation et des services sociaux, «alors que les secteurs scientifiques et informatiques sont dominés par les hommes».
Andrew Potter, de l’Université McGill, a beau dépeindre le Québec comme une société «pathologiquement aliénée», les Québécois, eux, estiment à 70 % vivre dans une société «plutôt juste», alors qu’en France, ce taux de satisfaction baisse à 42 %. Ils se disent heureux «avec un score moyen de 7,1 sur 10», un résultat qui «se compare à celui des pays d’Europe du Nord». Je suis agréablement surpris d’apprendre que 68 % des allophones qui ont étudié en français au secondaire ont poursuivi leurs études au cégep de langue française. Bien sûr, il en reste 32 % qui ne le font pas et il faut poursuivre nos efforts pour franciser l’ensemble des immigrants au Québec. Par contre, je ne suis pas surpris d’apprendre que le poids démographique du Québec au sein du Canada est passé de 28,8 % en 1961 à 23,6 % en 2011, tout comme a diminué son poids politique.
Cet ouvrage renferme un nombre incroyable d’informations pertinentes sur notre société et la place qu’elle occupe dans le monde.