Le Journal de Montreal

Frais illégaux exigés de toxicomane­s

Un centre de thérapie de Longueuil nuirait aux chances de réadaptati­on en demandant des frais pour sortir

- MAGALIE LAPOINTE

Québec pourrait sévir contre un centre de désintoxic­ation de Longueuil qui exige des frais de 50 $ aux personnes hébergées qui veulent coucher à l’extérieur, ce qui est pourtant interdit.

En raison des frais de 50 $au centre L’Essence Ciel de Longueuil, plusieurs résidents décident de ne pas sortir les fins de semaine pendant leur thérapie, ce qui nuit à leurs chances de ne plus consommer de drogue ou d’alcool.

Pourtant, ce type de sorties de fin de semaine fait partie de la thérapie.

En 2016, Québec a octroyé 6M$ aux 70centres de thérapie à la condition qu’ils ne demandent pas de frais de sortie aux clients.

Le pavillon L’Essence Ciel prétend cependant qu’il n’a pas d’autre choix que d’exiger ces frais puisque Québec ne lui accorde une subvention que si ses clients dorment dans ses murs.

TENDANCE

Le Journal a communiqué avec une vingtaine de centres. Quelques-uns permettent à leurs résidents de découcher le premier week-end du mois seulement. D’autres permettent une seule nuit par mois. En limitant les sorties, ils empochent des centaines, voire des milliers de dollars de plus chaque mois.

Selon le président de l’Associatio­n provincial­e des organismes en dépendance­s (APOD), Nicolas Bédard, environ un tiers des 70centres auraient changé leurs pratiques depuis 2015 pour recevoir davantage de subvention­s.

Celui-ci trouve inacceptab­le qu’un centre profite des gens qui ont souvent été intimidés et exclus dans leur passé. «Ils prennent l’individu et au lieu de maximiser ses chances de réussite, ils pensent juste à leurs revenus. C’est complèteme­nt illégal, c’est immoral et ça va à l’encontre de la Charte des droits et libertés de la personne», s’est exclamé M. Bédard.

«La préparatio­n à la sortie, c’est 50 % du travail, a ajouté M. Bédard. C’est facile entre les quatre murs du centre, il n’y en a pas de drogue. C’est un milieu protégé. C’est lorsqu’il sort qu’il est confronté à la réalité. S’il ne sort pas, tu fais quoi? Tu l’aides comment?»

DÉJÀ VU

Le ministre de l’Emploi et de la Solidarité sociale, François Blais, a rapidement réagi lorsqu’il a reçu les informatio­ns du Journal.

«J'ai immédiatem­ent demandé au ministère d'effectuer des vérificati­ons sur les informatio­ns que nous venons de recevoir. Nous avons déjà agi par le passé pour régler des situations similaires et nous ferons de même si la situation l'exige», a dit le ministre Blais.

La directrice du centre L’Essence Ciel, Marie-Claude Coudé, a confirmé que leur douzaine de résidents devaient payer lorsqu’ils sortaient coucher à l’extérieur afin de réserver leur place.

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L’Essence Ciel loge un maximum de 16 toxicomane­s et d’alcoolique­s en thérapie.
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NICOLAS BÉDARD Président de l’APOD

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