Comment les caribous
Québec critiqué pour ne pas avoir protégé davantage un troupeau sauvage depuis 40 ans
VAL-D’OR | Depuis 40 ans, Québec a pris plusieurs décisions pour tenter de protéger la harde de caribous forestiers de Val-d’Or. Mais selon les écologistes, il n’a jamais pris la seule mesure qui les aurait véritablement sauvés: empêcher le développement forestier et l’invasion humaine sur leur territoire.
La décision de transférer les 18 caribous sauvages restants au zoo sauvage de Saint-Félicien a surpris tout le monde. Tous s’accordent pour dire que ce constat d’échec n’est guère surprenant.
«Compte tenu de toutes les décisions discutables qui ont été prises par le passé, ce n’est pas surprenant, ce qui arrive», résume Henri Jacob, écologiste et président d’Action boréale.
Plusieurs écologistes ont demandé au gouvernement au cours des 40 dernières années d’interdire aux compagnies forestières et aux villégiateurs l’accès au territoire des caribous. Ça n’a jamais été fait.
Le caribou forestier de Val-d’Or s’est donc retrouvé isolé en raison du morcellement et de la destruction de son habitat sur son territoire, qui devrait être de 1000 à 1200km2, selon les spécialistes. Les coupes forestières et les constructions de chemins se sont multipliées année après année.
Toutes sortes de mesures de conservation, jusqu’aux plus extrêmes, ont été prises, mais sans contrôle du développement industriel, forestier et minier, estiment les observateurs.
«La cause directe, c’est la prédation, qui fait que la population ne réussit pas à augmenter en nombre. Mais ce qui a changé le régime de prédation, la cause ultime, c’est le programme de foresterie qu’on a», a dit Steeve Côté, professeur titulaire au département de biologie de l’Université Laval.
Ce dernier explique simplement que les coupes forestières ont créé des parterres de régénération qui ont attiré les originaux, et avec eux, leurs prédateurs, principalement des loups. «Un loup qui rencontre un caribou va bien sûr en profiter», ajoute Steeve Côté.
«Les mesures extrêmes qui ont été prises doivent absolument être couplées à des mesures de protection de l’habitat. Ça n’a pas été le cas. Le développement forestier et minier n’a pas été limité.
Il n’y avait pas de compromis sur le plan du développement forestier», croit Pier-Olivier Boudreault, biologiste et chargé de projet en conservation et foresterie pour la Société pour la nature et les parcs du Canada (SNAP).
UN ALLER SIMPLE
En 2018, les caribous seront envoyés au zoo. Plusieurs s’interrogent sur leurs chances de survie. Pas moins de 19 des 21 caribous qui se trouvaient au zoo de Saint-Félicien en 2015 sont morts. «Quand tu as un bilan comme celui-là, tu ne choisis pas une solution comme celle-là», croit Alain Branchaud, le directeur général de la SNAP. Rarement une décision aura-t-elle été à ce point presque unanimement décriée. «Ça ne sauvegarde absolument rien. C’est comme si on avait accepté que c’était la fin», dit Steeve Côté. Les chances de survie des caribous de Vald’Or sont faibles dans leur milieu actuel. Des groupes environnementaux préféreraient toutefois qu’on les laisse là où ils sont, dans leur vie sauvage, et qu’on concentre les efforts et l’argent sur d’autres populations de caribous qui peuvent être sauvées. «On a l’impression de défendre le droit de mourir dans la dignité des caribous», résume Henri Jacob. Quant à savoir comment il explique le déclin de la harde au fil des ans, le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs indique que la modification graduelle de leur habitat semble être la principale cause.
« C’est Comme donner de l’aspirine à quelqu’un qui a le cancer, tout en lui tenant le visage dans la boucane – de Henri CigarettesJacob »