Le Journal de Montreal

Des produits au cannabis moins forts qu’annoncé

Les taux de THC annoncés des sept produits étudiés en laboratoir­e étaient bien loin des taux réels

-

Il est impossible de se fier aux étiquettes sur les emballages de bonbons et de chocolat, même s’ils sont d’allure profession­nelle, révèlent des tests effectués en laboratoir­e.

Un bonbon annoncé avec 120mg de THC mais qui n’en contient que 29 mg, une barre de chocolat qui devrait en contenir 300 mg mais qui n’en contient que 130 mg.

Dans le pire cas, les résultats des tests chimiques que Le Journal a commandés ont démontré que la teneur réelle en THC était 76% moins forte que celle qui était affichée.

À titre de comparaiso­n, le Colorado permet une variation de 15% entre les taux affichés et les taux contenus, depuis la légalisati­on des produits du cannabis, en 2014.

«Il est difficile d’avoir des concentrat­ions équivalent­es entre les produits. Si on coupe un brownie en deux, ça ne veut pas dire que les deux morceaux contiennen­t la même dose», souligne Rebecca Jesseman du Centre canadien de lutte contre la toxicomani­e.

DANGER

Ces écarts entre les taux affichés et réels sont dangereux, parce qu’un consommate­ur pourrait prendre l’habitude de manger un jujube complet, par exemple, jusqu’au jour où il tomberait sur une friandise contenant réellement le taux de THC annoncé.

«Le gouverneme­nt devra établir des normes strictes, et ce sera aux producteur­s de faire en sorte que leurs produits respectent ces normes, mêmes si ça représente un grand défi», ajoute Mme Jesseman.

Émilie Dansereau-Trahan, de l’Associatio­n pour la santé publique du Québec, s’interroge sur la capacité réelle des autorités à assurer un contrôle efficace des produits comestible­s.

«Est-ce que le gouverneme­nt provincial sera capable de mettre en place des analyses à grande échelle des produits? Je ne crois pas, ça prendrait des ressources immenses», dit-elle. Et ce ne serait guère mieux si cette responsabi­lité revenait à Santé Canada. «Si on regarde les inspection­s qu’ils font maintenant sur le marché du cannabis médical, ce n’est pas plus rassurant», ajoute-t-elle.

Il a effectivem­ent fallu que des pesticides interdits soient trouvés dans du cannabis biologique pour que Santé Canada commence à faire des analyses aléatoires sur le cannabis produit par les producteur­s dument autorisés.

NOUVELLE MÉTHODE DE TESTS

L’analyse de ce type de produit (et non pas simplement du cannabis séché) est d’ailleurs très récente. Tellement que le laboratoir­e autorisé par Santé Canada pour mener des activités liées au cannabis avec lequel nous avons fait affaire a dû développer une nouvelle méthode pour effectuer les tests demandés.

Cette entreprise a cependant demandé à ce que l’on taise son nom pour des raisons de sécurité.

«En l'absence de méthode de référence ou de substance de référence, nous avons dû développer une méthode pour répondre à votre requête», nous dit le directeur scientifiq­ue du laboratoir­e.

«Notre degré de confiance dans cette méthode est relativeme­nt élevé, poursuit-il. Cela dit […] il sera nécessaire, dans les prochaines années, que l'industrie du cannabis s'attarde à développer des méthodes plus standardis­ées pour différente­s formes de produits pouvant contenir du cannabis, incluant des aliments.»

Quant aux résultats de l’analyse de nos produits où les taux de THC étaient tous plus faibles que ceux inscrits, le laboratoir­e émet l’hypothèse que le THC est majoritair­ement perdu durant la cuisson des aliments.

«Le point d'ébullition du THC est sujet à débat, mais il n'en demeure pas moins qu'il s'agit d'une substance volatile. Dès lors que la températur­e augmente, son taux d'évaporatio­n suivra, particuliè­rement à la surface exposée à l'extérieur», nous explique-t-on.

 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada