Menaces de bloquer l’enquête
Des familles autochtones ayant une proche disparue ou assassinée pensent qu’on se « moque » d’eux
OTTAWA | Des familles de Premières Nations éplorées par la perte d’une proche disparue ou assassinée menacent de bloquer l’accès aux réunions de l’Enquête nationale en cours parce qu’ils sentent qu’on se «moque» d’eux.
L’été dernier, le gouvernement Trudeau a donné suite à son engagement électoral en lançant l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées.
Mais l’exercice de réconciliation avec les peuples autochtones ne se passe pas comme prévu, alors que les critiques fusent de toutes parts depuis quelque temps.
Hier, des familles se sentant lésées ont mis le cap vers le Parlement à Ottawa pour exprimer leur profonde colère envers les commissaires qui président l’enquête.
«Notre appui à l’enquête est tombé à zéro, a affirmé le père d’une jeune femme dont la mort, il y a quatre ans, demeure à ce jour non résolue. Nous sommes préparés à bloquer l’accès aux audiences lorsqu’elles se tiendront dans nos communautés et même ailleurs.»
John Fox déplore que l’examen tarde à prendre son élan, alors que la commission a décidé de reporter à l’automne prochain les audiences qui devaient avoir lieu cet été.
M. Fox a noté que 10% du budget de 54millions$ de la commission a déjà été dépensé.
Ce dernier reproche aussi le manque de soutien aux familles qui souhaitent témoigner.
M.Fox affirme avoir téléphoné à la ligne 1 800 et envoyé des courriels aux fonctionnaires dans l’espoir de s’inscrire sur la liste des témoins.
Ses appels sont toutefois restés lettre morte, se désole-t-il.
«C’est une mascarade. On se moque de nous», a-t-il pesté.
TÉMOIGNAGES INCOMPRIS
Militante de longue date, Jocelyn Iahtail a, quant à elle, déploré que l’exercice se soit jusqu’à présent déroulé en ignorant la culture et les traditions des Premières Nations.
Par exemple, des témoignages offerts dans les langues autochtones par les «anciens» lors de rencontres publiques n’ont pas été compris par les représentants des gouvernements.
«Nous ne pouvons pas tolérer que nos histoires sacrées soient encore une fois mises sur une tablette», a lâché au bord des larmes Mme Iahtail.
«Nous l’avons dit depuis le début. Cette enquête doit être fondée sur les traditions autochtones. Actuellement, cela ressemble davantage à un procès.»
Le Chef national de l'Assemblée des Premières Nations (APN), Perry Bellegarde, a offert hier son soutien aux «nombreuses familles» qui ont exprimé leur «frustration grandissante» concernant l'enquête nationale.
«Nous nous attendons à une meilleure communication en ce qui a trait aux plans et aux échéanciers de la commission», a-t-il déclaré.
La semaine dernière, la commissaire en chef a répondu aux critiques qui s’accumulent et reconnu des erreurs de communications.