Le Journal de Montreal

Une forêt des Laurentide­s menacée

Québec donne des droits de coupes forestière­s dans une municipali­té qui dépend du tourisme

- Anne Caroline Desplanque­s ACDesplanq­uesJDM

« LE PLAN DE COUPES DU MINISTÈRE PRÉVOIT DE COUPER PLUS DE 50 % DE LA FORÊT. » – Claude Samson, de la Coalition pour la préservati­on du Mont-Kaaikop

Québec permettra des coupes forestière­s massives dans l’une des dernières forêts intactes des Laurentide­s, dans une municipali­té qui craint de ne plus pouvoir vivre de ses activités de plein air et de villégiatu­re.

« Ça va être un désastre, gronde le maire de Sainte-Lucie-des-Laurentide­s, Serge Chénier. Le monde n’ira pas là. Qui voudrait venir dans une forêt rasée ? »

La forêt de Sainte-Lucie-des-Laurentide­s est juchée sur la deuxième plus haute montagne des Laurentide­s, le mont Kaaikop, non loin du Mont-Tremblant. La municipali­té est parvenue à empêcher les coupes en s’adressant à la justice en 2014.

Mais le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs (MFFP), qui attribue les droits de coupes forestière­s, a obtenu l’annulation de l’injonction et compte bien laisser entrer les bûcherons.

CONSULTATI­ONS

Dans ce but, le MFFP a informé cette semaine le maire qu’il tiendra des consultati­ons publiques cet hiver. Néanmoins, « ces consultati­ons n’ont pas pour objectif de réviser les droits déjà consentis sur le territoire », indique au Journal la porte-parole du ministère, Caroline Bujold.

Elle précise d’emblée que « les travaux seront réalisés par une entreprise de la région possédant une garantie d’approvisio­nnement ».

« Ce que nous dit le MFFP, c’est “nous, on a donné des garanties d’approvisio­nnement en bois et on va les respecter que vous soyez contents ou pas” », traduit le maire Chénier.

« Le plan de coupes du ministère prévoit de couper plus de 50 % de la forêt, indique Claude Samson, de la Coalition pour la préservati­on du Mont-Kaaikop. On a la chance d’avoir une forêt mature non perturbée de plus de 90 ans. Si on la coupe, c’est cinq lacs qu’on met en danger. Il y a un risque d’érosion et de perturbati­ons irréparabl­es. »

INCOMPATIB­ILITÉ

Québec estime que les coupes ne sont pas incompatib­les avec les activités de villégiatu­re.

« Il est possible de concilier les usages », indique Mme Bujold. Impensable, réplique la coopérativ­e de plein air l’Interval, le moteur économique local.

« Nous, on vit de la montagne. Si elle est rasée, on n’aura plus rien à offrir. On serait dévasté », dit Guillaume Chartrand, l’adjoint à la coordinati­on de l’organisati­on.

« La bataille, c’est pas juste pour notre jolie vue, mais parce qu’il y a urgence environnem­entale. Si on ne fait rien, le territoire va être morcelé à la grandeur. Où va aller la faune ? » demande M. Samson.

Le mont Kaaikop est situé dans un secteur stratégiqu­e du réseau d’écocorrido­rs et d’aires protégées, qui connecte le Parc national du Mont-Tremblant au Parc national d’Oka. Ce corridor est notamment fréquenté par les loups et les lynx. Longtemps disparu, le cougar y serait également présent.

« En 20 ans, on a déjà connu sept campagnes de coupe. Lâchez Sainte-Lucie », plaide le maire Chénier.

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SOURCE: BUDGET 2014-2015
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PHOTOS COURTOISIE CLAUDE ALEXANDRE CARPENTIER, ROBERT PERRON ET COALITION MONT-KAAIKOP. Claude Samson (photo du haut), de la Coalition pour la préservati­on du Mont-Kaaikop, lance une pétition pour que le mont Kaaikop devienne une aire protégée. À droite, une vue de la montagne.
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