Le Journal de Montreal

Coupes de bois arrêtées en terre atikamekw

Victoire autochtone contre Québec et les forestière­s

- ANNE CAROLINE DESPLANQUE­S

Les coupes forestière­s en territoire atikamekw ont été suspendues hier sur ordre d’un juge parce que le ministère des Forêts a autorisé les opérations sans consulter la communauté.

« C’est une très grande victoire et un très grand soulagemen­t », a déclaré le chef Christian Awashish, les larmes aux yeux au sortir de la salle d’audience.

Le juge Thomas Davis a statué que les opérations forestière­s menacent la culture même de la Première Nation. Elles prévoient la récolte de 200 000 m3 de bois, soit l’équivalent de 53 piscines olympiques pleines, dans une des dernières forêts matures de la communauté d’Opitciwan, en Haute-Mauricie.

OPPOSITION

La famille Weizineau, qui détient des titres ancestraux sur le territoire visé, s’oppose depuis des années aux coupes. Mais, sans la consulter, le ministère des Forêts a autorisé une « opération spéciale » dans sa cour le mois dernier.

Pour le juge Davis, le Ministère a failli à son devoir de consultati­on. Il a donc suspendu les coupes jusqu’au 15 septembre, et a enjoint les parties à procéder à une consultati­on.

« Vous avez tous intérêt à travailler rapidement », a insisté le magistrat. Il s’adressait en particulie­r au Ministère et au chef atikamekw, car le devoir de consultati­on ne revient pas à la compagnie, le Groupe Rémabec (Arbec et Rébec).

DOMMAGES ET PRÉJUDICES

En plus de devoir consulter la communauté, le Ministère pourrait faire face aux demandes de compensati­on de l’entreprise et des Atikamekw.

Le chef Awashish a indiqué au Journal qu’il envisage un recours pour dommages et préjudices. Réjean Paré, le président et chef des opérations de Rémabec, indique lui aussi qu’il pourrait poursuivre l’État « pour les pertes encourues ».

« Il y a une centaine de familles qui ne seront pas payées s’ils [les travailleu­rs forestiers] ne sortent pas le bois », a plaidé l’avocat de l’entreprise Me Yves Robillard au juge Davis.

Me Daniel Benghozi, qui défend l’État dans ce dossier, a déclaré au Journal qu’une compensati­on financière « n’est pas écartée » pour Rémabec.

« C’est certain qu’ils vont avoir la possibilit­é de récolter les volumes de bois qui leur sont octroyés dans la garantie d’approvisio­nnement. On va trouver du bois ailleurs », a assuré Me Benghozi.

Le juge Davis a précisé dans son jugement que le préjudice était plus grand pour la Première Nation que pour l’entreprise.

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PHOTO COURTOISIE La Cour supérieure juge que le ministère des Forêts a failli à son devoir de consulter les Atikamekw avant d’autoriser la récolte de 200 000 m3 de bois sur leur territoire ancestral.

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