Le Journal de Montreal

Il a traversé 10 pays avant de se présenter au Canada

Un des demandeurs d’asile à avoir récupéré son aide financière de dernier recours

- BENOÎT PHILIE

Un demandeur d’asile arrivé au Québec avec 72 $ en poche après avoir traversé 10 pays était soulagé hier en récupérant son chèque d’aide sociale de 653 $ qui lui permettra de manger et de payer son loyer, dit-il.

« Ici, toutes les choses sont très chères… avec 100 $, on achète peu de choses. Et j’ai tout laissé chez moi en Haïti », lance Paul Dayou, 29 ans, en sortant du centre d’hébergemen­t pour migrants, où on lui a remis un chèque d’aide financière de dernier recours.

Le gouverneme­nt du Québec a commencé hier la distributi­on de ces chèques à près de 4000 migrants arrivés au pays dernièreme­nt. Environ 2,5 M$ seront versés aux demandeurs d’asile ce mois-ci.

Hier, des chèques ont été remis au stade olympique ainsi que dans l’ancien édifice des Soeurs de la Providence, à Ahunstic-Cartiervil­le, où a résidé M. Dayou avant d’aménager dans un logement à 700 $ par mois avec deux amis la semaine dernière.

« Quand je suis arrivé il y a un mois, j’avais un peu d’argent, mais j’ai des amis qui n’avaient rien du tout. », dit l’Haïtien, qui mélange un peu le français, l’espagnol et le créole.

« Maintenant, je veux acheter des meubles pour ma maison. Et de la nourriture. Du riz... du poulet », dit-il, en remerciant les Québécois, qu’il qualifie de « très aimables et respectueu­x ».

10 PAYS

M. Dayou a quitté son pays en 2015 avec la ferme ambition de se rendre jusqu’ici pour mener une meilleure vie, dit-il. Tellement, qu’il a été prêt à abandonner sa mère et à traverser 10 pays en deux ans.

« Brésil, Équateur, Colombie, Panama, Costa Rica, Nicaragua, Honduras, Guatemala, Mexique, États-Unis… puis Canada. J’ai passé des jours à marcher… c’était une expérience extrêmemen­t difficile », assure-t-il, en baissant les yeux.

Il dit avoir passé six mois en Floride avant de traverser la frontière canadienne de manière irrégulièr­e le mois dernier. Il espère étudier la climatisat­ion, travailler, mais surtout rester au pays pour de bon.

« Moi je veux rester ici. Ma décision est de rester ici. Je demande à Dieu et à toutes les forces de pouvoir rester ici », dit-il.

D’autres demandeurs d’asile croisés au centre d’hébergemen­t ont tenu à remercier les Québécois pour leur accueil, l’un d’eux qualifiant le Canada de « pays béni ».

Un réfugié haïtien d’une cinquantai­ne d’années a pour sa part indiqué qu’il souhaitait avant tout travailler pour gagner son argent.

« Je ne suis pas au Canada pour le chèque, je suis ici pour travailler », a assuré le plombier de profession au Journal.

ARRIVÉES STABLES

Du côté de la frontière, l’arrivée de demandeurs d’asile s’est stabilisée cette semaine à un peu plus d’une centaine de personnes par jour, soit près de 1000 par semaine, selon le Syndicat des douanes et de l’immigratio­n.

La semaine dernière, on comptait entre 200 et 250 demandes par jour, alors que ce nombre pouvait atteindre 500 au début du mois d’août. Le campement érigé à SaintBerna­rd-de-Lacolle accueillai­t environ 175 demandeurs d’asile mardi, comparativ­ement à 1200 il y a deux semaines.

Depuis le début de juin, au moins 8000 migrants sont entrés de manière irrégulièr­e au pays, principale­ment au Québec, en espérant fuir les politiques anti-immigratio­n de Donald Trump.

 ?? PHOTOS BENOIT PHILIE ?? Le demandeur d’asile haïtien Paul Dayou s’est dirigé vers la banque après avoir récupéré son chèque d’aide financière de 653 $ hier (mortaise). L’homme de 29 ans a refusé de montrer son visage pour éviter de nuire à son processus d’immigratio­n.
PHOTOS BENOIT PHILIE Le demandeur d’asile haïtien Paul Dayou s’est dirigé vers la banque après avoir récupéré son chèque d’aide financière de 653 $ hier (mortaise). L’homme de 29 ans a refusé de montrer son visage pour éviter de nuire à son processus d’immigratio­n.

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