Le Journal de Montreal

Montants « abusifs » de Bell pour des appels en prison

- MARIE-ÈVE DUMONT

Les familles de détenus sont particuliè­rement touchées par les montants « abusifs » facturés par Bell Canada pour des appels à frais virés, dénonce une demande de recours collectif déposée cette semaine.

« Les familles de prisonnier­s ne sont pas toutes privilégié­es, on exploite des gens vulnérable­s », s’insurge Joey Zukran, avocat responsabl­e du dossier.

Pour les prisonnier­s, il peut s’agir de la seule façon de maintenir un lien avec leur famille.

Le recours vise toutes les personnes qui ont fait des appels à frais virés depuis le 25 septembre 2014, mais dans une ère où le cellulaire est omniprésen­t, ce genre d’appel n’est plus monnaie courante. Un appel à frais viré permet de joindre quelqu’un à l’aide d’un téléphone public en transféran­t les frais de l’appel à la personne qui le reçoit.

157 $ POUR 12 APPELS

La représenta­nte du recours, Carole Ouellet, qui habite la région de Sherbrooke, répond régulièrem­ent aux appels à frais virés de son fils incarcéré à la prison de Trois-Rivières.

Pour seulement 12 appels, Mme Ouellet a payé 157 $ à Bell Canada pour 140 minutes de discussion, lit-on dans le document déposé à la Cour supérieure de Sherbrooke lundi soir. Un juge doit d’abord approuver la demande avant que les procédures judiciaire­s ne s’enclenchen­t.

Les appels locaux coûtent 1 $ tandis que les appels interurbai­ns sont à 2,50 $ en plus d’un montant supplément­aire facturé à la minute qui varie selon les régions, indique Bell sur son site.

ESSENTIEL

Mme Ouellet a préféré ne pas s’entretenir avec Le Journal, mais son avocat assure qu’elle fera valoir son point de vue devant le tribunal.

« Elle hésite à répondre quand elle voit que son fils l’appelle. Même si elle veut lui parler, elle pense toujours à la facture qui va venir », se désole Me Zukran, de LPC avocats.

Pourtant, le maintien du contact entre le détenu et sa famille est essentiel à sa réhabilita­tion, selon le criminolog­ue Jean-Claude Bernheim.

« Si lors de la libération le détenu doit repartir à neuf totalement, ce sera plus difficile à réaliser s’il n’a pas de lien avec la famille qui peut assurer un soutien », explique-t-il.

Aux États-Unis, la compagnie AT&T a accepté de verser 45 millions $ en compensati­on pour des appels à frais virés effectués dans des prisons de l’État de Washington.

Bell Canada a refusé de commenter.

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JOEY ZUKRAN Avocat

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