Harmonie retrouvée
Une nouvelle énergie anime Frédéric Blackburn et l’équipe féminine à l’approche des Jeux olympiques
QUÉBEC | L’air vicié qu’a respiré Frédéric Blackburn durant les Jeux olympiques de Sotchi a depuis été purifié.
Retour dans le temps : à quelques semaines des Jeux de 2014, un vent de contestation à l’interne soufflait sur la nuque de l’entraîneur-chef de l’équipe canadienne féminine de patinage de vitesse courte piste. Une communication tendue avait conduit à de profonds différends entre l’entraîneur et les athlètes, dont les meneuses Marianne St-Gelais, Marie-Ève Drolet et Valérie Maltais. Ça sentait le putsch.
« Sotchi, ça n’a pas été le fun », avoue Blackburn, rencontré la semaine dernière avant le départ en vue de la première Coupe du monde de la saison, de demain à dimanche, à Budapest.
FINI, « L’ATHLÈTE ROI »
Quatre années plus tard, aucun relent de cette ambiance ne subsiste, selon l’entraîneur. Embauché en 2012 pour succéder à Sébastien Cros, il avait attendu au début de l’actuel cycle olympique pour instaurer sa philosophie et défendre les nouveaux standards d’excellence auxquels il croyait, à commencer par un plus grand sens des responsabilités individuelles pour éradiquer le réflexe de « rejeter la faute sur les autres ».
« Dans ces situations-là, c’est souvent l’entraîneur qui est visé en premier », remarque le natif de Chicoutimi.
« Depuis Vancouver, je trouvais que c’était la philosophie de “l’athlète roi”. L’athlète demande quelque chose, on lui donne. Mais à un moment donné, c’est comme dans la société, j’avais l’impression que c’était devenu “toi, tu es là pour me servir”. Ce n’était pas une équipe. C’était juste des silos. Maintenant, on ne fonctionne plus en silo. On est une équipe qui s’en va aux Jeux », observe l’entraîneur, qui se plaît à employer le mot « énergie » pour qualifier ce qu’il ressent, des patineuses jusqu’au personnel d’encadrement.
Pour transformer l’attitude de « se contenter de seulement être bonnes pour gagner des médailles » à celle de « on veut être les meilleures », de profonds changements dans la cuisine de l’équipe devaient aussi être apportés à ses yeux. L’épisode des Jeux de Sotchi l’en a convaincu.
« On était rendu une agence de voyages et une agence de sécurité, et il n’y avait plus assez de “focus” sur la performance. On se faisait des réunions pour se doter d’un système de sécurité avec des cellulaires, il fallait qu’on s’occupe des parents, il y avait un comité pour ci et un autre comité pour ça. Voyons donc ! Je me disais : “on n’est pas ici pour ça, on est ici pour patiner” », évoque Blackburn.
« Comment se fait-il qu’on était un aussi gros groupe, mais qu’on n’ait pas vu venir cette dérape ? » demande-t-il.
AUCUNE AMERTUME
S’il a mal accueilli leur sortie dans les médias sur le malaise qui couvait avant les Jeux, Blackburn dit n’avoir gardé aucune amertume de la rébellion des patineuses, sauf peut-être lors de l’obtention de la médaille d’argent au relais à Sotchi, où elles ne sont pas allées partager leur joie avec lui le long de la patinoire après la course.
« Ça, ce fut quelque chose d’un peu plus difficile. Il y avait quand même un travail qu’on avait fait ensemble. Mais je n’en ai pas voulu directement aux athlètes. C’était le programme qui avait un problème », répète-t-il.