Le Journal de Montreal

Le Barça, plus qu’une équipe de soccer

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BARCELONE | Le produit d’exportatio­n le plus célèbre de la Catalogne, si je puis parler ainsi, c’est son mégaclub de soccer, le FC Barcelone, le plus prestigieu­x du monde avec le Real Madrid.

Il fait partie des organisati­ons de la société civile qui demandent officielle­ment la tenue d’un référendum sur l’indépendan­ce de la Catalogne.

Le club ne se prononçait pas pour l’indépendan­ce, mais pour le droit des Catalans à décider seuls de leur avenir.

Les autorités européenne­s du soccer ont souvent sanctionné le club parce qu’il permet le déploiemen­t de drapeaux catalans, assimilés au camp souveraini­ste, dans son stade.

UN CLUB ENGAGÉ

Le défenseur central Gerard Piqué n’a jamais caché ses conviction­s indépendan­tistes, source de nombreuses controvers­es quand il revêt le maillot de l’équipe nationale espagnole.

Pep Guardiola, l’entraîneur du club pendant ses plus grandes années, est récemment monté sur les tribunes pour dénoncer « l’État autoritair­e » espagnol et réclamer le droit pour les Catalans de se prononcer.

Joan Laporta, président du club entre 2003 et 2010, lâcha en 2006 : « La Catalogne est une nation à part entière. Un jour viendra où l’oppression espagnole touchera à sa fin. J’espère de mon vivant voir un match de Coupe du monde entre la Catalogne et l’Espagne. »

Le FC Barcelone n’appartient pas à un milliardai­re, mais aux dizaines de milliers d’adhérents qui paient une cotisation annuelle. Ils élisent la direction au suffrage universel.

Il y a donc aussi, parmi eux, des tas d’antisouver­ainistes et de gens qui préférerai­ent que le club soit complèteme­nt apolitique.

Certains brandissen­t le spectre d’une exclusion du Barça du championna­t espagnol en cas d’indépendan­ce. Mais pourquoi la se priverait-elle d’un des plus grands clubs du monde ?

L’AS Monaco joue dans le championna­t français alors que la Principaut­é de Monaco ne fait pas partie du territoire français.

PORTE-ÉTENDARD

Liga

Dès sa fondation, en 1899, le club s’est fait un porte-étendard de la nation catalane. Son écusson reprend le drapeau catalan et ses couleurs rouge et jaune.

L’autre grand club de la ville, l’Espanyol, incarnera plutôt l’adhésion à l’Espagne et, en 1912, ajoutera le mot « Real » à son nom pour bien marquer son allégeance à la monarchie.

Solidement républicai­ne, la Catalogne est donc considérée comme une région « ennemie » quand la guerre civile éclate en juillet 1936.

Arrêté par les soldats du général Franco, le président du FC Barcelone, Josep Sunyol, est fusillé le 6 août 1936.

Le bombardeme­nt de Barcelone du 16 mars 1938, par l’aviation franquiste, tue 3000 personnes et détruit une partie des bureaux administra­tifs du club.

Après sa victoire, Franco place un de ses fidèles à la tête du club avec le mandat de l’« espagnolis­er ».

Le drapeau catalan disparaît du stade et du maillot du club. La langue d’usage n’est plus le catalan.

Pendant les longues années de la dictature (1939-1975), comme les Catalans n’ont plus ni parlement ni gouverneme­nt propre, le Barça devient plus que jamais un véhicule de leur identité nationale.

La rivalité avec le Real Madrid est d’autant plus féroce que celui-ci est perçu comme le club favori du dictateur.

IDENTITÉ

Quand le FC Barcelone inaugure son stade (le Camp Nou) en 1957, Franco interdira qu’on lui donne le nom de Joan Gamper, premier président du club et nationalis­te catalan assumé.

En 1968, le président du club, Narcis de Carreras, dit que le Barça est « més que un club » (plus qu’un club), une phrase chargée de sens, devenue aujourd’hui la devise du club.

La « recatalani­sation » du club se fera dès que la dictature commence à montrer des signes d’essoufflem­ent.

Le catalan redevient la langue officielle du club. Le drapeau catalan retrouve sa place. Le club se prononce pour l’enseigneme­nt obligatoir­e du catalan dans les écoles.

Il y a deux semaines, dès que la police espagnole a détenu des dirigeants catalans et saisi bulletins de vote et matériel publicitai­re, le club a de nouveau réitéré son adhésion au droit des Catalans de décider de leur avenir.

Pouvez-vous imaginer le Canadien jouant un tel rôle chez nous ? Je sais, c’est comique juste d’y penser…

 ?? PHOTO D’ARCHIVES ?? L’ex-entraîneur du FC Barcelone Pep Guardiola, ici photograph­ié en 2011 lors de sa victoire de la Ligue des champions, a dénoncé récemment « l’État autoritair­e » espagnol.
PHOTO D’ARCHIVES L’ex-entraîneur du FC Barcelone Pep Guardiola, ici photograph­ié en 2011 lors de sa victoire de la Ligue des champions, a dénoncé récemment « l’État autoritair­e » espagnol.

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