Le Journal de Montreal

Un « deal » en or pour Airbus

- michel.girard@quebecorme­dia.com MICHEL GIRARD

Non seulement Airbus n’a pas payé une cenne pour devenir l’actionnair­e majoritair­e de la C Series, mais en plus l’avionneur européen s’est fait octroyer un bloc de 100 millions de bons de souscripti­on à un prix d’exercice de 2,29 $ l’action de Bombardier. Ce prix d’exercice était basé sur le cours de l’action juste avant l’annonce.

Au prix actuel de l’action de Bombardier, soit 2,83 $, cela signifie que le géant européen de l’aéronautiq­ue a déjà accumulé sur papier un bénéfice de 54 millions de dollars.

On résume le « deal » : ainsi Bombardier cède gratuiteme­nt à Airbus 50,01 % des parts de la Société en commandite Avions C Series (SCACS), en plus d’un bloc de 100 millions de bons de souscripti­on d’une valeur de 54 millions $, qui, une fois exercé, accordera à Airbus le contrôle de 5 % de Bombardier.

Quand on pense que le développem­ent de la C Series a nécessité jusqu’à maintenant des investisse­ments de 6,8 milliards $ US, chapeau aux négociateu­rs d’Airbus !

QUÉBEC ET LA CAISSE

À comparer à l’entente que la direction d’Airbus a conclue avec Bombardier, le gouverneme­nt Couillard et la Caisse de dépôt et placement du Québec font piètre figure avec leurs ententes. Un rappel s’impose.

Il y a deux ans, le 29 octobre 2015, Bombardier annonce que le gouverneme­nt du Québec vient d’investir 1 milliard $ US dans la C Series. En retour de cet investisse­ment, Québec obtient initialeme­nt 49,5 % de la Société en commandite Avions C Series (SCACS) et un bloc de bons de souscripti­on lui permettant d’acquérir 200 millions d’actions de Bombardier au prix d’exercice de 2,21 $ l’action.

Le prix d’exercice représente à l’époque une forte prime de 38 % par rapport au cours moyen de l’action (1,60 $) lors des précédente­s séances.

Pis encore, lors de l’annonce de l’entente « définitive », en juin 2016, on apprend que Québec avait finalement accepté de se faire couper de moitié son bloc de bons de souscripti­on, celui-ci passant de 200 à seulement 100 millions.

Pour sa part, la Caisse de dépôt et placement du Québec n’a guère obtenu une meilleure entente au chapitre des bons de souscripti­on, au contraire.

Lors de l’annonce de son investisse­ment de 1,5 milliard $ US dans Bombardier, le 19 novembre 2015, la Caisse obtient 30 % de la Division Bombardier Transport et un bloc de bons de souscripti­on lui permettant d’acquérir 106 millions d’actions de Bombardier au prix d’exercice de 2,21 $.

À l’époque, l’action de Bombardier se négocie autour de 1,28 $. On parle donc d’une prime de l’ordre de 72 %.

AU BORD DU GOUFFRE

Alors pourquoi Québec et la Caisse ont-ils accepté de se faire octroyer des bons de souscripti­on à prime si élevée ?

C’est d’autant plus inacceptab­le que Bombardier était à l’époque (automne 2015) au bord du gouffre.

Québec et la Caisse n’avaient aucune raison valable de payer éventuelle­ment une si forte prime pour acquérir des actions de Bombardier alors qu’ils y investissa­ient 2,5 milliards $ US pour sauver l’entreprise.

Aujourd’hui, Québec et la Caisse se retrouvent avec le même nombre de bons de souscripti­on de Bombardier qu’Airbus… qui n’a pas mis une cenne noire, tout en devenant l’actionnair­e majoritair­e de la C Series. Et Québec ne détient plus que 19 % de la C Series !

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