Le Journal de Montreal

MARC DE FOY Gestion sur fond de panique

- marc.defoy@quebecorme­dia.com

Geoff Molson l’a dit la semaine dernière. Appuyer sur le bouton de panique au plus fort d’une crise n’est pas un mode de gestion auquel il souscrit. C’était la seule chose qu’il pouvait dire en ce début de saison catastroph­ique du Canadien. Bien que sa position soit défendable, M. Molson sait très bien, par contre, que son explicatio­n ne passe pas dans une très grande tranche du public.

Les mécontents ont actionné leur sonnette d’alarme. Les sirènes résonnent aux quatre coins de la ville. On veut voir rouler des têtes. Marc Bergevin passe un mauvais quart d’heure sur les réseaux sociaux. Il n’est pas le seul. Ceux qui pensent depuis toujours que Carey Price est surévalué s’en donnent à coeur joie.

Max Pacioretty y goûte aussi. Même Michael Bossy estime qu’il devrait démissionn­er du poste de capitaine. Venant de cet homme posé, ça surprend. Mais il a droit à son opinion, comme tout le monde.

Ça tire de partout !

BERGEVIN NE RÉPOND PAS

Pendant ce temps, Bergevin se tient à carreau. Son visage affichait tous les traits de sa colère lors du périple de son équipe en Californie, la semaine dernière.

Pas de bonjour, pas de salutation, rien.

Ce n’est pas l’homme qu’on a connu comme joueur. On peut comprendre comment il se sent, mais il ne peut pas toujours fuir les journalist­es.

Dimanche, deux membres de la confrérie journalist­ique, un francophon­e et un anglophone, ont demandé au service des relations avec les médias du Canadien s’il pouvait rendre Bergevin accessible hier.

Non seulement la démarche était tout à fait légitime, mais elle avait été formulée de façon à ce que la direction ait le temps de se préparer.

Le but de l’exercice n’était pas de dépecer Bergevin sur la place publique, mais de lui poser des questions.

La demande des médias a reçu une fin de non-recevoir avant la séance d’entraîneme­nt.

Décision d’organisati­on, a-t-on invoqué.

On ne s’attendait pas à ce qu’il prenne tout le blâme sur ses épaules, comme il l’avait fait quand il était devenu évident que Carey Price ne reviendrai­t pas au jeu, il y a deux ans.

Même si la saison est jeune, Bergevin devrait parler, ne serait-ce que pour tenter de rassurer un peu les partisans.

Cette façon de faire n’a pas été instituée avec l’arrivée de Bergevin. Elle remonte à l’ère de Bob Gainey, dont une des premières décisions à titre de directeur général du Tricolore avait été de sortir les journalist­es des vols nolisés.

MAUVAISE GESTION

Il faut mentionner, à cet égard, que les organes de presse ne bénéficiai­ent d’aucune gratuité sur ces envolées. Les tarifs étaient souvent plus élevés que pour des vols ordinaires.

Gainey avait expliqué sa décision en disant qu’il voulait donner à ses joueurs le plein espace qui leur était accessible.

Cet épisode a été suivi de plusieurs autres règlements qui ont contribué à élever un mur d’une hauteur à donner le vertige entre toute personne de l’organisati­on et les journalist­es. Il règne un climat de méfiance et d’aversion envers la presse.

Avec le temps, de Gainey à Bergevin, en passant par Pierre Gauthier, le directeur général du Canadien a été placé dans une tour d’ivoire dont il ne sort généraleme­nt qu’à des dates précises. On parle au début, au milieu et à la fin de la saison, à la fin de la période des transactio­ns ainsi qu’avant et après le repêchage.

On est loin de l’époque de Serge Savard et de ses prédécesse­urs. Les temps ont changé avec la multiplica­tion des médias, mais il y a un juste milieu à observer. On est perçus comme des empêcheurs de tourner en rond et bien plus. On est vus comme l’ennemi. C’est l’impression que l’on nous donne.

Pourtant, à côté de marchés comme celui de Toronto et de grosses villes américaine­s comme New York, Chicago ou Los Angeles, la presse montréalai­se est docile et peu exigeante.

Dans la Big Apple, où les back pages des sports sont aussi percutante­s que les front pages de l’actualité dans le Daily News et le Post, les journalist­es peuvent aborder le directeur général des Yankees Brian Cashman tous les jours.

Et les Yankees, c’est beaucoup plus gros que le Canadien !

Après sa première année à la présidence des Maple Leafs de Toronto, Brendan Shanahan a déclaré qu’il était terminé, le temps où les joueurs imputaient leurs insuccès aux médias.

C’est de la bullshit, était-il allé jusqu’à dire.

SEMAINE CAPITALE

En attendant, Claude Julien est le dirigeant du Canadien qui doit se taper toutes les rencontres de presse. Il était encore là, hier, droit comme un chêne derrière son lutrin, sur le podium de la salle d’entrevue du centre d’entraîneme­nt, à Brossard.

Bergevin lui a amené deux jeunes, Nikita Scherbak et Michael McCarron, qui, espère-t-il, sauront faire des étincelles avec Alex Galchenyuk.

Galchenyuk et Scherbak ensemble, sait-on jamais ? Ça ne coûte rien d’essayer. Les gens sont nombreux à penser que le Canadien en est déjà au stade où il joue sa saison. Il disputera trois matchs au Centre Bell cette semaine et neuf de ses 13 prochains à domicile. Cette séquence nous conduira au 18 novembre.

Julien n’a pas démontré le moindre signe d’agacement quand je lui ai demandé si cette semaine est capitale pour la suite des choses.

« Les amateurs ont le droit de penser que c’est une grosse semaine et, nous aussi, on a le droit de le penser », a-t-il dit.

« Il reste que si on porte notre focus sur la semaine au lieu de notre prochain match [ce soir contre les Panthers de la Floride], on va manquer le bateau encore.

« Ce match doit être un tournant pour nous. Après, on pourra penser à notre match de jeudi [contre les Kings de Los Angeles]. À un moment donné, il doit y avoir un match qui fait tourner le vent. »

Et c’est ce soir qu’il faut que ça commence.

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