Des employés d’Accurso servaient de prête-noms
Un avocat qui travaille pour lui avoue avoir été remboursé pour un don au PLQ
L’avocat des entreprises de Tony Accurso admet avoir lui-même servi de prête-nom pour financer le Parti libéral du Québec, et estime que cette pratique était répandue chez les employés de ce géant de la construction.
Guillaume Rochon, avocat corporatif de l’entrepreneur depuis 2006, a raconté, hier, devant la Cour supérieure, qu’il avait été approché en 2007 par Charles Caruana, un des bras droits d’Accurso, pour signer un chèque de 3000 $ à l’intention du Parti libéral du Québec (PLQ).
Il était entendu que l’avocat serait remboursé par l’entreprise pour son don politique.
Une telle pratique est interdite. Même à cette époque, la loi stipulait que seuls les particuliers, et non les entreprises, avaient le droit de donner de l’argent pour les élections.
L’homme de loi a accepté de contourner les règles. « Ça avait l’air d’une demande naturelle, tout le monde [dans l’entreprise] le faisait, je n’ai pas posé de questions », a-t-il témoigné sous serment devant le juge James Brunton de la Cour supérieure.
Guillaume Rochon a raconté que son don avait été remboursé par l’entreprise d’Accurso « en compte de dépenses », une manoeuvre classique utilisée par de nombreuses firmes qui ont eu recours à des prête-noms.
Il a affirmé que c’était la seule fois qu’il avait été approché pour participer à ce genre de stratagème, et a précisé qu’il ignorait combien d’employés se faisaient convaincre par M. Caruana chaque année.
JAMAIS POUR VAILLANCOURT
Me Rochon a admis ces faits dans le cadre du procès de Tony Accurso, au palais de justice de Laval. Témoin de la défense, il était à ce moment contre-interrogé par Richard Rougeau, le procureur de la Couronne.
Accurso est soupçonné d’avoir été un acteur important du stratagème de trucage des contrats publics à Laval pendant une quinzaine d’années. En échange, selon la Couronne, ses entreprises versaient une ristourne en argent comptant correspondant à 2 % de la valeur des contrats qu’elles obtenaient.
Dans le cas de Laval, Me Rochon a dit qu’il n’avait jamais servi de prête-nom pour financer le PRO des Lavallois, la formation politique que dirigeait l’ex-maire de Laval Gilles Vaillancourt.
Hier, Guillaume Rochon a passé une bonne partie de la journée à présenter des organigrammes complexes qui montrent la structure des entreprises d’Accurso. Ces montages ressemblent à une véritable toile d’araignée de compagnies à numéro, de filiales et de conseils d’administration.
Avec son témoignage, la défense entend prouver que l’ex-magnat de la construction ne pouvait être au courant de tout ce qui se passait au quotidien dans ses entreprises (voir autre texte).