Le Journal de Montreal

Une soirée pas comme les autres

- RAPHAËL GENDRON-MARTIN

Allons-nous vraiment assister à un spectacle d’humour ? La question était toute légitime lorsqu’on a aperçu plusieurs agents de sécurité et policiers postés à l’entrée du Théâtre Maisonneuv­e, hier soir.

Humoriste le plus controvers­é de l’heure au Québec, Guy Nantel faisait la rentrée montréalai­se de son nouveau spectacle, Nos droits et libertés, quelques jours après avoir reçu des menaces de mort, qui ont mené à l’arrestatio­n d’un individu à Québec.

La sécurité était imposante et elle a forcément teinté le début de la soirée. Dès notre entrée dans le théâtre, il y avait toujours l’inquiétude de voir si des gens allaient perturber le déroulemen­t du spectacle. Finalement, il ne s’est rien passé de tel et Guy Nantel a livré son spectacle comme un autre de sa tournée.

TENSION PALPABLE

Et c’est là où nous avons été agacés. Il y avait forcément un éléphant dans la salle, hier soir. La tension était à couper au couteau. Tout le public venait d’être fouillé à l’entrée. On s’attendait à ce que Guy Nantel arrive sur scène et qu’il adresse d’entrée de jeu la controvers­e des derniers jours.

Mais non, dès son arrivée sur les planches, il a sauté sur son matériel de

Nos droits et libertés. Et il n’a pas débuté avec un sujet léger, loin de là, se lançant d’entrée de jeu dans une longue tirade sur la religion.

Il y avait un décalage à l’écouter faire des blagues sur Jésus (« il n’a jamais baissé les bras, particuliè­rement à la fin »), alors que tout le monde attendait son segment sur le consenteme­nt sexuel, qui a tant fait parler ces derniers jours.

LE SUJET DE L’HEURE

Guy Nantel n’a pas trop fait patienter le public alors qu’il a finalement abordé le sujet de l’heure, au bout d’une quinzaine de minutes.

En tout, le segment sur Alice Paquet – qu’il ne nomme jamais – dure tout au plus deux minutes. Et les blagues, livrées dans leur contexte, sont beaucoup moins controvers­ées qu’on l’avait anticipé. Mais sont-elles drôles pour autant ? Avec le climat des dernières semaines, et de la soirée d’hier, la rigolade était franchemen­t plus difficile.

On a tout de même souri, un peu plus loin, en entendant Nantel blaguer sur Gilbert Rozon (« Un gars qui me met la main dans les culottes, je ne dirai pas : tous les gars sont comme ça. Je dirai: enlève ta main, Gilbert ») et Éric Salvail (« Quel gars ici n’a jamais déposé son pénis sur le bureau d’un collègue pour faire avancer un dossier ? »).

Ce n’est qu’au bout de 40 minutes que Guy Nantel a finalement dit, brièvement, qu’il avait eu « assez de misère cette semaine ». On aurait grandement préféré qu’il aborde le sujet plus tôt.

Nos droits et libertés est-il un bon spectacle ? Il faudra retourner le voir dans quelques semaines, ou mois, lorsque la poussière des derniers jours sera tombée. En ce moment, on n’arrive pas à se prononcer.

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