Le Journal de Montreal

Le courage d’aller chercher de l’aide dans le « couloir de la honte »

- CHRISTOPHE­R NARDI

OTTAWA | « Tu n’allais pas dans le couloir de la honte de peur de perdre ta job ». Un ex-militaire atteint d’un trouble de stress post-traumatiqu­e dit avoir souffert des années en silence en raison du tabou entourant la santé mentale dans l’armée.

« Dans les Forces, si tu souffres, tu dois souffrir en dedans, tout seul. On se faisait souvent dire par la chaîne de commandeme­nt que si on allait dans le couloir de la honte qui menait aux services psychosoci­aux, notre carrière était finie », explique Sébastien Albert.

Fantassin pendant 17 ans, il a fait deux tours en Afghanista­n qui l’ont laissé avec d’importante­s douleurs dans le dos, un trouble de stress post-traumatiqu­e et de l’anxiété intense.

VOIR SES AMIS MOURIR

Le résident de la Rive-Sud de Montréal avoue avoir fait deux tentatives de suicide depuis son retour du Moyen-Orient, ce qui l’a poussé à quitter les Forces armées en mai pour des raisons médicales.

« C’est ce que j’ai vu et vécu en Afghanista­n qui m’a fait quitter les Forces. J’ai vu des amis mourir », ditil, sans entrer dans les détails.

L’ex-sergent raconte qu’il lui a fallu au moins trois ans de « souffrance en silence » avant qu’il aille finalement chercher de l’aide psychologi­que.

L’été dernier, sa santé mentale a d’autant plus souffert, après avoir dû vivre pendant quatre mois « sur la carte de crédit » avant de recevoir son premier chèque de pension.

UNE JOB AU MCDO

Afin de subvenir aux besoins des siens, l’ex-militaire a tenté un retour au travail au... McDonald’s.

« C’est impossible pour moi de travailler. J’ai réussi à faire deux jours au McDonald’s avant de péter un plomb contre un petit adolescent qui me sifflait après pour que je lui parle. Ce n’est pas comme ça qu’on traite un militaire », relate Sébastien Albert.

« C’est un stress financier incroyable, qui fait juste s’ajouter à toutes les angoisses que tu vis déjà, dit-il. J’ai trois enfants et une femme à nourrir et aucun revenu qui entre. »

Son retour à la maison et ses problèmes de santé mentale ont aussi failli faire éclater son couple.

« Ma transition a été rock’n’roll pour toute la famille. Ma femme et moi sommes passés proche du divorce quelques fois depuis. Quand elle m’a rencontré, j’étais un homme très différent. »

Newspapers in French

Newspapers from Canada