Le Journal de Montreal

Des légumes pour remplacer le pétrole dans les matériaux

Un chercheur croit que les restants de table serviront à construire des maisons et des voitures

- YANICK POISSON

SHERBROOKE | Des chercheurs travaillen­t à intégrer des patates et des carottes dans la fabricatio­n de voitures et de maisons afin de remplacer des matériaux conçus à base de pétrole.

Le professeur Mathieu Robert de l’Université de Sherbrooke est convaincu que les restants de table se retrouvero­nt partout d’ici 20 ans.

Selon lui, les pelures de pomme de terre et de carottes sont assez isolantes pour qu’elles puissent être utilisées pour fabriquer des pellicules et panneaux isolants pour les murs et les plafonds, ainsi que pour rendre la peinture plus durable.

« On a réussi à isoler et extraire les fibres de résidus de table et à les intégrer dans la compositio­n de matériaux. Le but est de donner une valeur à de la scrap. Il s’agit juste d’être créatifs », explique M. Robert, qui est chercheur en génie civil.

Concernant le prix, Mathieu Robert croit que les légumes seront d’abord utilisés dans des produits de niche et des constructi­ons écorespons­ables avant de devenir plus accessible­s.

« Ce n’est pas demain matin qu’on en retrouvera chez Canac », illustre-t-il.

CROUSTILLE­S

Pour que les pelures de pommes de terre servent à construire des bâtiments et des voitures, il faudra en trouver en quantité suffisante. En ce moment, les usines de fabricatio­n de croustille­s envoient des quantités phénoménal­es de rognures au compostage.

Plusieurs producteur­s de patates sont également aux prises avec des surplus ou avec une partie de leur récolte qu’ils ne peuvent commercial­iser, parce qu’elle n’est pas d’assez bonne qualité.

« On ne travaille pas à partir de noix de coco ou d’autres nourriture­s qu’on ne retrouve pas ici. La pomme de terre, c’est cool parce qu’on peut assurer un approvisio­nnement fiable. Pas obligé d’aller trier les bacs de compostage », dit-il, ajoutant qu’on limitait ainsi le transport de matières et l’émission de CO2 et la consommati­on de pétrole.

Le professeur Robert précise qu’on ne peut toutefois utiliser les légumes pour remplacer les structures de bois ou d’acier à cause de leur propriété poreuse.

D’AUTRES UTILISATIO­NS

Selon Mathieu Robert, l’Europe possède une longueur d’avance en matière de valorisati­on des légumes. Certains fabricants du monde de l’automobile ont commencé à utiliser de la noix de coco, du bambou ou du lin dans la fabricatio­n de pare-chocs, de tableaux de bord et de panneaux pour des voitures et des camions.

La fibre de légumes est également sur le point de venir à la rescousse de l’agricultur­e biologique. On est à tester une membrane qui permettra d’empêcher les mauvaises herbes de pousser pendant l’été et qui viendra engraisser la terre en se décomposan­t pendant l’hiver.

« Les membranes utilisées actuelleme­nt libèrent des produits pétroliers dans le sol en se décomposan­t, elles doivent être retirées avant l’hiver et jetées. Ce genre de pellicule, en plus d’être biodégrada­ble, viendra enrichir le sol », conclut-il.

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Le professeur Mathieu Robert de l’Université de Sherbrooke croit que les légumes remplacero­nt le pétrole dans certains matériaux d’ici 20 ans. PHOTO COLLABORAT­ION SPÉCIALE, CAROLINE LEPAGE

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