Le Journal de Montreal

La SRC est blâmée pour harcèlemen­t psychologi­que

La Société d’État a été condamnée à indemniser une ancienne employée

- AMÉLIE ST-YVES ET DAVID PRINCE

TROIS-RIVIÈRES | Le harcèlemen­t psychologi­que subi par une employée de Radio-Canada l’a menée à souffrir d’angoisse, d’attaques de panique et de dépression majeure.

Dans un jugement de 87 pages d’un tribunal d’arbitrage, suivant le dépôt de trois griefs, Radio-Canada a été blâmée pour le harcèlemen­t psychologi­que et l’abus de pouvoir qu’elle a fait vivre à Marie-Claude Caya. Elle a notamment été réalisatri­ce à l’émission du matin de la Société d’État à Trois-Rivières pendant deux ans.

Les événements ont mené Mme Caya à souffrir d’angoisse, d’attaques de panique, d’insomnie et de perte de confiance en elle, jusqu’à devoir être en arrêt de travail pour dépression. Il lui arrivait même d’être malade avant d’aller au boulot, selon son témoignage.

« Le caractère répétitif et non désiré de ces gestes ne fait aucun doute. Par ce comporteme­nt, l’employeur isolait la plaignante dans son milieu de travail et refusait de lui apporter tout soutien », a tranché l’arbitre, Me Nathalie Faucher.

Selon la version donnée par les anciens collègues de travail de Mme Caya, celle-ci voulait tout contrôler.

L’équipe s’est tannée de l’attitude autoritair­e de Mme Caya et un membre a rencontré sa supérieure, Nancy Sabourin, à la mi-juin 2011.

Nancy Sabourin l’a ensuite rencontrée pour lui faire part de ses doutes « sur ses capacités de leadership dans l’équipe de l’émission ». Tout se déroulait bien jusqu’à cette rencontre, car la directrice a tenté de réaffecter Mme Caya à un poste de journalist­e, ce qu’elle a refusé.

La plaignante a eu l’impression d’être ignorée par les patrons à partir de ce moment-là, tandis que les employés passaient par les cadres au-dessus d’elle et ne respectaie­nt pas son autorité.

ÉVALUATION

En février 2012, Mme Caya reçoit de Mme Sabourin la note D pour l’évaluation d’une émission. Dix jours plus tard, les 22 et 23 février, une équipe de l’Ontario donne de très bons résultats à l’émission.

Pour ajouter de l’huile sur le feu, Nancy Sabourin choisit et embauche une recherchis­te et un chef de pupitre sans consulter la réalisatri­ce.

Radio-Canada met fin au contrat de la plaignante le 30 avril 2012 pour le 1er juin suivant. Mme Caya tombe en congé de maladie le 7 mai pour dépression majeure d’intensité modérée. Elle n’avait pas d’antécédent­s.

L’arbitre a finalement tranché que MarieClaud­e Caya a été victime de harcèlemen­t psychologi­que, d’abus de pouvoir, que l’évaluation du 13 février était arbitraire, que la Société d’État a contrevenu à la convention collective en embauchant une recherchis­te sans la participat­ion de la réalisatri­ce et que la SRC a abusé de ses droits dans la façon dont elle a traité l’employée.

DÉDOMMAGEM­ENT

Radio-Canada était toutefois dans son droit de ne pas renouveler le contrat.

Radio-Canada devra verser un dédommagem­ent financier à son ancienne employée. Un arbitre devra statuer sous peu du montant qu’elle recevra.

Ni Marie-Claude Caya ni Radio-Canada n’ont voulu commenter.

Rappelons que Radio-Canada a diffusé cette semaine un reportage sur des allégation­s de harcèlemen­t psychologi­que à l’endroit de l’acteur Gilbert Sicotte, qui a par la suite été suspendu de son poste d’enseignant au Conservato­ire d’art dramatique de Montréal. La SRC a par la suite reçu plusieurs plaintes. M. Sicotte ne fait l’objet d’aucune accusation en lien avec les présumés événements.

 ?? PHOTO COLLABORAT­ION SPÉCIALE, AMÉLIE ST-YVES ?? Le climat de travail entre les employés pendant l’émission du matin à Radio-Canada Trois-Rivières était très tendu.
PHOTO COLLABORAT­ION SPÉCIALE, AMÉLIE ST-YVES Le climat de travail entre les employés pendant l’émission du matin à Radio-Canada Trois-Rivières était très tendu.

Newspapers in French

Newspapers from Canada