La politique américaine face au fléau du harcèlement sexuel
Donald Trump, plutôt discret jusqu’ici, commence à s’immiscer dans le débat
WASHINGTON | (AFP) Après Hollywood, le monde de la politique américaine est à son tour secoué par le débat sur le harcèlement sexuel, et le président Donald Trump, jusqu’à présent très discret, commence à s’impliquer – malgré les accusations qui pèsent contre lui.
Cette semaine, un sénateur démocrate, Al Franken, s’est excusé pour avoir embrassé une animatrice en 2006 et touché sa poitrine ; deux femmes parlementaires ont révélé qu’au moins deux de leurs collègues masculins, non nommés, ont été des harceleurs sexuels ; le directeur de cabinet d’une élue, accusé de harcèlement, a démissionné jeudi ; et de nouvelles femmes ont accusé un candidat républicain au Sénat, Roy Moore, d’agressions sexuelles il y a des décennies.
AU CONGRÈS AUSSI
Le Congrès a connu sa part de scandales sexuels dans son histoire, y compris pour des faits de harcèlement ou d’agression.
L’un des plus connus est Dennis Hastert, ancien président de la Chambre des repré- sentants, qui a admis l’an dernier avoir abusé sexuellement d’étudiants alors qu’il était entraîneur de lutte, des décennies auparavant. Ou Clarence Thomas, dont la nomination à la Cour suprême en 1991 a failli être rejetée en raison d’accusations de harcèlement sexuel.
Mais le harcèlement n’était pas vraiment reconnu, dans le monde politique, comme un fléau nécessitant une réponse systémique. La vague de révélations déclenchées par l’affaire Harvey Weinstein, depuis le 5 octobre, a changé la donne.
Désormais, chaque élu et collaborateur de la Chambre devra suivre une formation anti-harcèlement et anti-discrimination, a annoncé cette semaine son président, Paul Ryan. Même mouvement au Sénat, où ces formations étaient facultatives.
HAUTEMENT COMBUSTIBLE
Le harcèlement sexuel et la politique forment un mélange hautement combustible, et il était sans doute inévitable que les médias et commentateurs conservateurs ravivent l’affaire Monica Lewinsky, la jeune stagiaire de la Maison-Blanche avec qui le président Bill Clinton eut des relations sexuelles.
Mais il ne s’agit plus que de Fox News. Une sénatrice démocrate, Kirsten Gillibrand, a dit jeudi au New York Times que Bill Clinton aurait dû démissionner. Des journalistes progressistes, comme Matthew Iglesias (Vox.com) et Chris Hayes (MSNBC), ont appelé les démocrates à faire amende honorable, notamment auprès de Juanita Broaddrick, qui accuse Bill Clinton de viol depuis des décennies.
DONALD TRUMP
Tout cela conduit naturellement à l’actuel président, accusé par une dizaine de femmes de baisers ou contacts forcés.
Donald Trump est accusé d’hypocrisie. D’un côté, lui et ses alliés ont toujours accusé ses accusatrices de faux témoignages... Mais le milliardaire s’est permis, tout en restant silencieux sur Roy Moore, d’éreinter le sénateur démocrate Al Franken, sur Twitter, jeudi soir.
« Et dire que la semaine dernière encore il faisait la leçon sur le harcèlement sexuel et le respect des femmes », a-t-il écrit, à l’offensive.
Mais le terrain est dangereux pour le milliardaire. Natasha Stoynoff, qui l’a accusé de l’avoir embrassée de force en 2005.