Le Journal de Montreal

Un « faux débat » ridicule, disent certains distilleur­s

- CATHERINE MONTAMBEAU­LT

Plusieurs distilleur­s qui utilisent l’alcool neutre de l’Ontario dans leurs produits estiment que le débat entourant l’appellatio­n « Origine Québec » est inutile et ridicule.

« C’est comme si on disait que le fromage de chèvre produit à Charlevoix n’est pas québécois parce que la chèvre est née aux États-Unis! » illustre Nicolas Duvernois, pdg de PUR Vodka.

« C’est un faux débat, parce qu’il doit y avoir deux ou trois producteur­s au Québec qui font de la culture du grain et qui l’utilisent pour la distillati­on, ajoute-t-il. C’est une minorité qui fait ça pour une soi-disant pureté, alors qu’en réalité, ça ne change rien. »

DES « FRUSTRÉS »

M. Duvernois considère que la bataille qu’ont menée certains distilleur­s pour faire modifier les critères de l’appellatio­n « Origine Québec » est une perte de temps.

« Tout ça, c’est pour quelques producteur­s qui sont frustrés parce qu’ils ne vendent pas, lance-t-il. Moi, j’étais le premier à faire une vodka au Québec, et je n’aurais jamais réussi si j’avais perdu mon temps comme ça. »

François Pouliot, propriétai­re du Domaine Neige, explique que l’alcool neutre utilisé par la plupart des producteur­s de spiritueux n’a pas de goût ni de caractère, par définition.

« Donc, même s’il est acheté en Ontario, ça n’a aucun impact sur le produit final, soutient-il. C’est une matière première, et c’est ce que tu fais avec qui fait ton produit, selon moi. Ça reste des produits québécois même si la matière première n’est pas d’ici. »

ET LA BIÈRE ?

Stéphan Ruffo, président de l’Associatio­n des microdisti­lleries du Québec (AMDQ), souligne que si les spiritueux contenant de l’alcool ontarien ne sont plus considérés comme québécois, aucune bière produite au Québec ne pourra plus l’être.

« Les bières québécoise­s sont généraleme­nt faites à partir d’un grain qui ne vient pas du Québec, indique-t-il. Alors est-ce qu’on arrête de considérer ces bières-là comme québécoise­s ? »

De son côté, le copropriét­aire de la Distilleri­e du Fjord, Jean-Philippe Bouchard, dit comprendre que les distilleur­s qui fabriquent des produits 100 % québécois souhaitent se distinguer des autres sur les tablettes.

« On comprend qu’ils veulent faire reconnaîtr­e ça, mais en même temps, il ne faut pas oublier que notre industrie est très compétitiv­e, et que c’est pour une question purement économique qu’on utilise l’alcool neutre de l’Ontario, rappelle-t-il. Si on est une petite entreprise et qu’on veut être viable, on n’a pas trop le choix. »

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