LE FEU SACRÉ BRÛLE TOUJOURS
Yvon Foisy met ses jambières et ses patins deux fois par semaine
VAL-MORIN | À l’aube de ses 82 ans, le feu sacré du hockey brûle toujours intensément dans le coeur d’Yvon Foisy. Pour preuve, hier matin, il gardait son filet sur une patinoire extérieure des Laurentides.
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Il faisait une température parfaite au parc Legault de Val-Morin. Ni trop froid ni trop chaud. Un ciel nuageux et un mercure juste sous la barre des -10 0C. Une raison de plus de mettre patins et jambières pour cette troisième Classique hivernale annuelle de la Ligue des jeunes aînés des Laurentides.
Même si le thermomètre avait plongé sous les -20o, cette vingtaine de joyeux lurons aurait tout de même sauté sur la patinoire comme dans le bon vieux temps. Rien ne les arrête.
ENDURANCE, PASSION ET PERSÉVÉRANCE
On comprendra qu’au vénérable âge de 81 ans, 82 à la fin de mars, Yvon Foisy est le doyen de cette ligue fondée en 1998.
La suite logique d’une vieille ligue de garage regroupant des joueurs de 55 ans et plus. La moyenne d’âge des quelque 70 patineurs tourne autour de 68 ans. Les « jeunots » ont tout juste fêté leur 60e.
« J’adore cette atmosphère. Il règne un fort esprit de camaraderie. Je suis avec mes copains et je fais de l’exercice », relate Foisy, en entrevue avec Le Journal de Mon
tréal, assis sur un ballot de foin devant le feu de camp à l’entrée de la patinoire.
« Je leur envoie en même temps un message de persévérance, poursuit l’homme qui réside à Val-Morin depuis le début des années 1940. Ils voient que je ne suis pas prêt à lâcher. Je suis encore compétitif. Si ce n’était pas le cas, j’arrêterais. La même chose si j’avais un problème de santé. Je n’en ai pas. Je ne prends aucun médicament et je ne suis pas un buveur. À part ma petite bière après le match », nuance ce mécanicien, l’air taquin, entouré de ses coéquipiers venus lui tirer la pipe près du foyer.
EN DEMANDE
Membre du Temple de la renommée canadien des joueurs de hockey âgé de 80 ans et plus depuis 2016, M. Foisy enfile ses jambières au moins deux fois par semaine de septembre à avril à l’aréna de SainteAgathe-des-Monts. Quand il les accroche, à la fin de la saison, il compte près de 80 matchs dans les pattes. Il faut ajouter à cela les nombreuses fois où il répond présent aux invitations ponctuelles qui lui sont adressées dans la grande région de Montréal.
« Il y a des ligues qui m’appellent pour que je joue avec des gars de 60-70 ans, ajoute-t-il. Je trouve ça flatteur, parce que je joue avec des plus jeunes. Je dois donner un bon coup. Ça me force à continuer. »
Son épouse Suzanne Lévesque le voit tout donner sur la glace. « En jouant avec des plus jeunes, ça l’encourage à continuer depuis très longtemps », assure-t-elle.
Et c’est sans compter les nombreux voyages à l’étranger pour participer à des tournois. Il a entre autres visité la France et la Russie. En septembre, il s’envolera pour l’Alaska avec ses compagnons. Il laissera toutefois son filet à la relève. Mais il trimbalera son équipement dans ses bagages… juste au cas. Une blessure est si vite arrivée.
SOSIE DE DRYDEN
Selon les registres du Temple de la renommée canadien 80+, Foisy est entré dans un groupe très sélect. Une cinquantaine de patineurs de la Belle Province figurent parmi les quelque 140 intronisés. Bon nombre d’entre eux, dont certains sont âgés de près de 90 ans, évoluent chez les Sages de la Rive-Sud, à Saint-Hubert.
S’il fait partie des meubles, Foisy n’en a pas perdu son style pour autant. Il rendrait jaloux ses jeunes coéquipiers et n’importe
quel sexagénaire devant son filet. Ses camarades le comparent à Ken Dryden, non pas en raison de ses poses appuyées sur son bâton, mais bien en raison de son style. Parfois, ricaneur, il leur offre le cliché de l’ancien gardien étoile du Canadien.
Ce qu’il accomplit est extraordinaire, aux dires de tous. « C’est une véritable force de la nature », assure l’arbitre Robert Lapierre, 72 ans, témoin privilégié de ses exploits depuis belle lurette.
Pas question de lui laisser des chances. Hier, M. Foisy a remporté la rencontre grâce à quelques acrobaties bien calculées, dans un gain de 7 à 5. L’une des règles de sécurité non écrites empêche par contre un attaquant de couper au filet afin de prévenir des blessures.
« C’est une force de la nature, dit Denis Julien, 74 ans. Ils ne sont pas des tonnes les gardiens de son âge au pays. Il ne faut pas qu’il arrête de vivre sa passion, sinon, ce serait la fin. »